Le Journal de Quebec - Weekend
GRAND AMOUR CACHÉ À TOUS
Après avoir raconté avec beaucoup de sensibilité une histoire d’amour et la mort d’un amant dans Arrête
avec tes mensonges, l’écrivain français Philippe Besson partage avec douceur et sincérité une passion vécue dans la clandestinité dans son nouveau roman, Un certain Paul Darrigrand.
En 1988, le narrateur a 22 ans. Il est toujours aux études et croise en classe un autre garçon, Paul. Au fil des pages, il raconte une histoire intense, secrète, remplie de non-dits et situations conduisant droit au cul-desac.
Son roman se lit d’une traite. Philippe Besson arrive à ralentir le temps, à décrire parfaitement le sentiment amoureux, à partager l’émotion, l’intensité, la tendresse. Avec beaucoup de transparence.
« C’est très autobiographique, commente l’auteur, en entrevue. Mon désir profond, c’était de raconter cette vérité intime. Il y a quelque chose qui s’est libéré avec l’écriture d’Arrête avec tes
mensonges. J’ai l’impression que maintenant, je me sens capable de dire une vérité intime, sans devoir passer par le filtre du roman. Cette faculté s’est ouverte et maintenant, j’ai envie de raconter les choses sans fard, avec, j’espère, toujours, de la délicatesse et de la sensibilité. »
Philippe Besson précise qu’il est arrivé à un âge où, tout à coup, on se souvient de la jeunesse. « S’il en reste une trace, il faut peut-être en faire témoignage. C’est ça qui m’a animé : dire, on a été heureux, un jour. Je voulais qu’il reste une trace de ce bonheur-là, au moins. »
ENTRE L’OMBRE ET LA LUMIÈRE
L’histoire qu’il raconte a été compliquée, « douloureuse par moments », même, parce qu’elle a été clandestine et contrariée. Mais elle a quand même existé.
« Elle m’a rendu profondément heureux. Malgré les obstacles, malgré les ambiguïtés, malgré les silences, malgré l’ombre, il y avait un sentiment amoureux très vif, qui emporte tout sur son passage. Tout d’un coup, c’est comme si on ne voulait plus voir les obstacles, qu’on faisait comme s’ils n’existaient pas. »
Une photo retrouvée dans une boîte à chaussures a servi de déclencheur pour l’écriture. « J’étais disponible, intellectuellement et sensoriellement, pour raconter cette histoire. À la fois, on pourrait dire que j’ai vécu avec Paul Darrigrand une année difficile, une année d’inquiétude, de désarroi... et pour autant, ça a été une année très belle, très heureuse. Quand j’ai vu la photo, il y avait le bonheur de retrouver cet instant, cette grâce qui nous avait animés, et puis la douleur de constater que le temps avait passé et que les années nous avaient roulé dessus. »
NOSTALGIE
La joie de raconter la jeunesse et la mélancolie, de constater le passage du temps anime chaque page du roman. « La mémoire était intacte. Toutes les choses sont revenues sans effort. Les détails me sont revenus. Et c’est avec les détails qu’on raconte le mieux les histoires. »
L’histoire d’amour qu’il raconte est universelle – elle parle de sentiments avant tout. « J’étais heureux d’avoir posé des mots sur cette histoire et de la raconter aux gens, avec l’espoir que, peutêtre, ils y reconnaîtront une part d’eux-mêmes. Au fond, les histoires d’amour, même compliquées, sont universelles.
« On est tous passés par des moments où on aime des gens qui nous aiment moins que nous, qui ne nous aiment pas pareil, qui ne sont pas complètement disponibles. C’est arrivé à plein de gens de se lancer dans des histoires inabouties, ou qui ne pouvaient pas véritablement fonctionner. » Philippe Besson a publié plus d’une quinzaine de romans. L’adaptation cinématographique du roman Arrête avec tes men
songes est en cours. Le tournage doit commencer au mois de septembre. Il aimerait revenir au Québec pour rencontrer les lecteurs.