Le Journal de Quebec - Weekend

LA BEAUTÉ DES INNUS

- CÉDRIC BÉLANGER Le Journal de Québec cedric.belanger @quebecorme­dia.com

Quand elle est tombée sous le charme de Uashat et Maliotenam et qu’elle a voulu y tourner un film avec les Innus, la cinéaste Myriam Verreault a fait le choix d’opter pour le beau au détriment des préjugés associés à la vie sur les réserves autochtone­s. Vous voulez du gros drame ? Ce n’est pas dans Kuessipan que vous en trouverez.

« C’est facile de zoomer sur ce qui est lette. Notre intention n’était pas de les idéaliser ou de cacher la misère. Juste de montrer la beauté des gens, la beauté dans ce qu’ils ont d’humain », clame la réalisatri­ce de Québec, qui s’était fait connaître avec le long métrage À l’ouest de

Pluton, en 2008. Il faut croire que sa vision était bonne. Kuessipan, qu’elle a écrit avec l’appui de l’auteure innue du roman du même nom, Naomi Fontaine, arrivera en salle précédé par des critiques élogieuses, dont celles obtenues au Festival internatio­nal du film de Toronto, sans compter le Grand Prix qu’elle a récolté au Festival de cinéma de la ville de Québec. Trois fois pourtant, la SODEC lui a dit non. « Tu te poses des questions », avoue Mme Verreault. « Y a-t-il assez de drame dans mon film ? Parce que souvent, c’est ce qu’ils veulent. Que ça pleure. On fait un truc sur les réserves, il faut absolument que ce soit thrash, dur. Mais on ne voulait pas faire ça. On avait envie de dire que ça peut bien aller des fois. On voulait le faire avec subtilité et tendresse, montrer la vie

telle qu’elle est sans tomber dans le sensationn­alisme. »

Kuessipan n’est pas totalement exempt de drames, mais ceux-ci n’en sont pas le moteur. L’âme du film tout en tendresse se situe plutôt dans le lien indestruct­ible entre deux jeunes filles, qu’on voit grandir jusqu’aux portes de l’âge adulte et dont l’amitié saura résister à leurs ambitions divergente­s.

L’une, issue d’une famille aimante, tombe amoureuse d’un Blanc et cherche à s’émanciper à travers l’art, tandis que l’autre, jeune maman aux prises avec un conjoint turbulent, est davantage attachée aux traditions.

Ces deux filles, Mikuan et Shaniss, sont interprété­es par Sharon Fontaine-Ishpatao et Yamie Grégoire qui, comme à peu près tout le monde au générique du film, n’avaient aucune expérience de plateau de tournage.

LA GÊNE DE L’UNE, LA CONFIANCE DE L’AUTRE

Toutes deux ont été choisies au terme d’un long processus qui a vu 400 Innus se présenter aux auditions.

« Malgré leur inexpérien­ce, je sentais qu’elles avaient de la drive et un sens artistique. Ce sont des filles allumées », souligne Myriam Verreault.

Vraiment trop gênée, Sharon Fontaine-Ishpatao a d’abord refusé de participer aux auditions malgré les invitation­s à s’y rendre.

« Ensuite, une autre personne m’a proposé d’y aller. À un moment donné, je me suis tannée et j’y suis allée. »

À l’inverse, Yamie Grégoire avait envie de jouer dans Kuessipan et respirait la confiance en elle quand elle a pris part aux tests.

« Naomi était mon prof de français et elle avait parlé du film. Je me souviens que Myriam était venue à l’école et que je l’avais regardée dans les yeux en me disant : toi, c’est sûr que tu vas me prendre. Jamais je n’avais été aussi confiante que ça dans ma vie. »

Kuessipan prend l’affiche le 4 octobre. Étienne Galloy et Brigitte Poupart, qui a aussi aidé à la formation des acteurs innus, font partie de la distributi­on.

Le film sera en compétitio­n au Festival internatio­nal du film francophon­e de Namur, en Belgique, les 2 et 3 octobre.

 ??  ?? Les comédienne­s Yamie Grégoire et Sharon Fontaine-Ishpatao en compagnie de la réalisatri­ce Myriam Verreault.
Les comédienne­s Yamie Grégoire et Sharon Fontaine-Ishpatao en compagnie de la réalisatri­ce Myriam Verreault.
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