Le Journal de Quebec - Weekend

LA DURE RÉALITÉ DES CAS DE FUGUEUSES

- YAN LAUZON, Agence QMI

Pas moins de 6000 fugues sont recensées chaque année au Québec, dont le tiers sont liées à l’exploitati­on sexuelle. Alors que la populaire série de TVA Fugueuse s’attarde à cette triste réalité en fiction, la série documentai­re En fugue, qui sera offerte dès lundi sur Club illico, plonge à pieds joints dans la vraie vie.

Pour redonner espoir, tenter de retrouver trois jeunes femmes disparues et comprendre à quel point les enquêtes s’intéressan­t aux réseaux de prostituti­on peuvent être complexes, on a fait appel à deux femmes aux parcours bien différents.

On s’est adjoint les services de Martine Laurier, une enquêteuse retraitée du SPVM qui reprend du service après avoir consacré quelque 10 années de sa carrière à rechercher des gens.

On s’est également tourné vers Maylissa Luby, une survivante de l’exploitati­on sexuelle devenue intervenan­te en réinsertio­n sociale.

Jumelées pour la première fois de leur vie, les deux femmes se complètent à merveille. Elles sont la tête et le coeur dans un univers sombre.

Sur leur chemin, de multiples intervenan­ts qui dressent un portrait tout sauf rose d’existences brisées.

PASSER À L’ACTION

Rapidement, Martine Laurier rappelle qu’il ne faut rien négliger dans le cas d’une disparitio­n.

« Cette personne qu’on cherche a un historique, a un vécu, des habitudes, un mode de fonctionne­ment, une façon d’agir, un modus operandi, explique l’ex-policière. Nous, il faut le découvrir. Toute scène, toute situation nous parle. Avec les années de police et d’enquête, ou de cours que j’ai pu suivre, on est outillés à voir ça, à suivre ça. »

Éprouvant de la compassion pour les parents victimes de dommages collatérau­x, elle n’en demeure pas moins pragmatiqu­e.

« Quand je fonce dans une enquête, mon cerveau devient un hamster qui carbure à “c’est quoi ma prochaine piste ?” […] On est tout le temps en mode questionne­ment. On n’a pas les réponses, mais il faut être en mode questionne­ment tout le temps pour pallier toutes les éventualit­és. »

Confiant avoir « redécouver­t le goût d’enquêter » grâce à cette série, Martine Laurier a vécu un nouveau « rush » d’adrénaline lors de son baptême à la télé.

Elle a souhaité faire une différence auprès des citoyens.

PARTAGER POUR AIDER

Aux côtés de Martine Laurier, il y a Maylissa Luby, une femme qui a réussi à se sortir de l’industrie du sexe après de nombreuses années. Pour la première fois, elle déballe toute son histoire devant les caméras. « Je suis vraiment guérie, dit-elle. La motivation, c’est d’aider d’autres femmes à guérir, d’amener quelque chose à une victime, une personne qui écoute mon histoire et qui est capable de relier son parcours. »

Elle souhaite ainsi permettre de croire qu’il est possible de changer son chemin. « J’ai beaucoup d’espoir et je comprends le processus de sortir de ça, de se reprendre en main, de se connecter avec toi-même. Je me fais toujours dire que j’amène de l’espoir, c’est quelque chose en moi que je veux amener. La vie sans espoir, quand t’es mal pris comme ça, c’est “rough”. »

De plus, les entretiens qu’elle a avec les parents des disparues pour qui, rappelle-t-elle, « il y a peu de ressources » et « tellement d’impuissanc­e » ont plusieurs vertus. « Ça me donne de l’honneur, de la dignité […] Quand je dis aux parents que c’est possible, je le crois vraiment. »

Les cinq épisodes de la production originale En fugue, réalisés par André St-Pierre, pourront être regardés à compter de lundi.

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PHOTOS COURTOISIE CLUB ILLICO ET FRÉDÉRIQUE MÉNARD-AUBIN

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