Le Journal de Quebec - Weekend

C LE CHEMIN DE LA RÉCONCILIA­TION

Il est difficile d’imaginer une pire souffrance pour un parent que de voir mourir son enfant. Anne Dorval a dû se plonger dans cet état psychologi­que complexe et torturé pour incarner une mère endeuillée dans le drame 14 jours, 12 nuits.

- MAXIME DEMERS Le Journal de Montréal maxime.demers @quebecorme­dia.com

« J’ai toujours cru qu’on n’était pas obligé d’être mère pour jouer une mère à l’écran. Mais il se trouve que j’en suis une. Et quand j’ai accouché, la première chose à laquelle j’ai pensé, c’est: si je meurs, qu’est-ce qui va arriver? Et si mes enfants meurent avant moi, que va-t-il se passer ? En tant que mère ou parent, on a toujours cette angoisse-là en nous », observe Anne Dorval.

« Et là, dans ce film, je dois jouer cela. C’est sûr que c’est beaucoup de stock à porter et qu’on n’a pas nécessaire­ment envie de se mettre dans cet état-là. Mais comme c’est la première fois que je joue ce genre de personnage, j’ai eu envie de tout donner pour rendre hommage aux femmes courageuse­s qui ont déjà perdu un enfant. »

Réalisé par Jean-Philippe Duval ( Dédé

à travers les brumes) d’après un scénario de Marie Vien ( La passion d’Augus

tine), 14 jours, 12 nuits a été tourné au Vietnam il y a deux ans.

Le film suit le périple d’Isabelle (Anne Dorval), une océanograp­he qui a perdu sa fille de 17 ans d’origine vietnamien­ne dans un accident survenu dans le BasSaint-Laurent. Un an après cet événement tragique, elle décide de partir en pèlerinage au Vietnam pour tenter de comprendre d’où vient sa fille. Mais sans que ce soit prévu, elle aura l’occasion de rencontrer la mère biologique de sa fille, Thuy (Leanna Chea).

« Pour moi, c’est avant tout une histoire de réconcilia­tion entre deux mères qui ne devaient pas se rencontrer et qui ont des histoires complèteme­nt différente­s, souligne Anne Dorval. Il y a plein de couches qui m’intéressai­ent dans ce personnage-là. Et je trouvais que l’histoire était belle. Ça aurait pu être un film misérabili­ste. Mais c’est plutôt une histoire lumineuse qui parle de pardon et de renaissanc­e. »

DÉPAYSEMEN­T

En plus de devoir se glisser dans la peau de cette femme rongée par la culpabilit­é, Anne Dorval a dû affronter plusieurs de ses craintes pour ce tournage. Et les premiers jours n’ont pas été de tout repos :

« Déjà, un vol de 18 heures, pour une personne qui a peur de l’avion comme moi, c’était quelque chose, lance-t-elle en riant. Puis j’ai été malade tout de suite en descendant de l’avion. J’ai attrapé un virus, alors je me suis retrouvée à l’hôpital de Hanoi. Je suis ensuite restée couchée pendant une semaine à l’hôtel. Je grelottais et je faisais de la fièvre. »

C’était la première fois qu’Anne Dorval mettait les pieds en Asie. Et le dépaysemen­t a été total.

« J’ai eu tout un choc devant le flot de scooters dans les rues de Hanoi qui klaxonnent sans arrêt. Ils sont 100 millions dans la rue, et c’est non-stop. C’est paniquant. Ça m’a pris une semaine avant d’être capable de traverser la rue devant mon hôtel tellement j’avais peur de mourir. C’est terrorisan­t. »

Pour le réalisateu­r Jean-Philippe Duval, cet état de « choc culturel » dans lequel Anne Dorval a été plongée pendant le tournage a bien servi le personnage: « Anne est très intelligen­te, dit-il. C’est une actrice d’émotion et d’instinct. Elle ne me l’a jamais dit directemen­t, mais je pense qu’elle voulait vivre ce choc et ce dépaysemen­t pour se mettre dans la peau d’Isabelle. »

ÉVITER LA CARTE POSTALE

En tout, Jean-Philippe Duval a passé trois mois au Vietnam pour le tournage de son film. Travaillan­t avec une équipe réduite (composée notamment du directeur photo réputé Yves Bélanger), il s’est laissé guider par son instinct tout au long de ce road-trip vietnamien.

« Toute l’équipe était sur le qui-vive, pendant le tournage, indique-t-il. Quand il se passait quelque chose, il fallait être attentif à cela. Je cherchais une certaine spontanéit­é. Mais en même temps, je ne voulais pas faire un film touristiqu­e ou de carte postale. Isabelle ne va pas là en touriste. Son intention première, c’est d’aller vivre son deuil et panser ses blessures. » 14 jours, 12 nuits, à l’affiche le 6 mars.

 ??  ?? Dans 14 jours, 12 nuits, Anne Dorval joue le rôle d’une mère endeuillée qui part en pèlerinage au Vietnam pour tenter de comprendre les origines de sa fille adoptive, décédée un an plus tôt.
Dans 14 jours, 12 nuits, Anne Dorval joue le rôle d’une mère endeuillée qui part en pèlerinage au Vietnam pour tenter de comprendre les origines de sa fille adoptive, décédée un an plus tôt.
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