Le Journal de Quebec - Weekend

ABANDONNER UNE VIE « PARFAITE »

- MARIE-FRANCE BORNAIS Le Journal de Québec

Considérée comme l’une des auteures les plus importante­s des Pays-Bas, la journalist­e et romancière Saskia Noort explore les conséquenc­es d’un viol sur la vie intime d’une femme dans un nouveau roman d’une grande puissance émotionnel­le, L’île de mes démons. Difficulté­s intérieure­s, divorce, culpabilit­é, quête de sens et espoir de guérison sont à la base de ce livre coup de poing inspiré du mouvement #MeToo.

Après s’être à nouveau disputée avec son conjoint alcoolique et jaloux, Sara, l’héroïne du roman, décide de tout plaquer et d’abandonner un semblant de vie parfaite.

En pleine crise, elle décide de se réfugier sur une île volcanique italienne – Stromboli – pour participer à une difficile retraite de développem­ent personnel.

Une fois sur place, elle n’a pas la vie facile. Sara est confrontée à tous ses démons intérieurs, aux souvenirs difficiles à évoquer, à son perfection­nisme, à ses attentes et à celles des autres.

Face à elle-même, elle en voit de toutes les couleurs et doit trouver une façon de s’en sortir et d’enfin guérir.

Saskia Noort, en entrevue par courriel depuis sa résidence des Pays-Bas, explique qu’après avoir écrit sept thrillers, elle avait envie d’écrire un roman parlant d’une femme qui quittait son mari.

« J’ai remarqué que la personne qui quitte l’autre, spécialeme­nt s’il s’agit d’une femme, doit porter tout le fardeau de la culpabilit­é. »

Elle ajoute que l’écriture du livre a été parfois très difficile et lourde d’émotions. « C’est autobiogra­phique puisque je suis moi-même divorcée, mais mon mari ne m’a jamais battue ni trahie avec une autre femme. »

DES GENS CONSERVATE­URS

Dans le roman, Sara fait face aux commérages des gens de son entourage et de sa petite ville, de même qu’au jugement très sévère de son noyau social.

Saskia Noort explique que les Hollandais ne sont pas si libres que cela face aux engagement­s matrimonia­ux.

« Les gens moins conservate­urs vivent dans les villes, mais dès qu’on les quitte, les gens sont beaucoup plus conservate­urs. Ils pensent que les femmes devraient rester à la maison pour s’occuper des enfants, faire du commérage et s’inquiéter qu’on leur vole leur mari. Il y a beaucoup de jugement social en ce qui concerne les femmes et il y a un mouvement conservate­ur aux Pays-Bas. »

Le mouvement #MeToo a clairement inspiré l’écrivaine. « Je me suis inspirée de toutes ces femmes courageuse­s qui ont décidé de parler. J’étais l’une d’elles et j’ai écrit un article dans le journal, parce que je suis une victime de viol. Je voulais dire aux autres femmes qu’elles ne sont pas seules et qu’on peut être heureuse à nouveau, en cessant de se sentir honteuse, coupable et humiliée. »

LE MARI S’EXPRIME

Saskia Noort, pour créer un équilibre entre ses personnage­s, fournit également le point de vue du mari dans cette histoire de séparation et de divorce. « Plusieurs écrivains ont une chronique dans laquelle ils parlent désormais de leur vie privée. La plupart du temps, ils n’écrivent qu’au sujet de leur vie heureuse et spéciale et de leurs amours. J’espère qu’ils auront autant de cran que le mari, dans mon roman, et qu’ils écriront au sujet de leur colère et de leur douleur. » Et puisqu’une grande partie de l’histoire se déroule dans un atelier de croissance personnell­e très particulie­r, où les participan­ts se retrouvent sur une île volcanique, Saskia Noort ajoute qu’elle a vraiment séjourné là-bas. « J’ai fait une retraite à Stromboli, mais elle était très différente de celle que je décris dans mon livre. Mais on s’est assis sur un volcan et la plupart de mes personnage­s sont inspirés des vrais participan­ts. » Saskia Noort est journalist­e et romancière. Elle est considérée comme l’une des plus importante­s auteures actuelles des Pays-Bas. Ses romans ont reçu de nombreux prix et sont traduits en plusieurs langues. Elle en a vendu plus de 3 millions d’exemplaire­s. Son prochain thriller sera publié en hollandais, l’été prochain.

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