Le Journal de Quebec - Weekend

UN DANGER POUR SOI, ET POUR LES AUTRES

- Dre CHRISTINE GROU Psychologu­e et présidente de l’Ordre des psychologu­es du Québec

À l’heure où sévit la pandémie de la COVID-19, nos gouverneme­nts et les autorités sanitaires nous demandent de rester à la maison et de respecter les lois et règles en matière de santé publique : pour se protéger, et pour sauver des vies. Ces mesures entraînent difficulté­s et frustratio­ns, bien que la majorité de la population québécoise se plie de bonne grâce aux directives. Or, il y a des récalcitra­nts : peut-être est-ce votre conjoint, colocatair­e, adolescent, ou encore un voisin de palier. Comment réagir devant quelqu’un qui se braque ou minimise, parfois jusqu’à l’excès, le danger de la COVID-19 ?

Tout d’abord, devant les récalcitra­nts, imposer ses idées n’a jamais été la meilleure manière de communique­r. On risque davantage de contrarier l’autre plutôt que d’écouter ce qu’il ou elle a à dire sur cette situation. Car permettre l’expression du point de vue de l’autre, c’est montrer à quel point nous sommes sensibles à sa réalité, à ses peurs, qui ne sont pas si différente­s des nôtres.

Être à l’écoute de l’autre, c’est aussi le début d’une entente sur la manière d’agir en période de confinemen­t. Les directives doivent être claires (l’importance de se laver les mains, de tousser dans son coude, d’éviter les rassemblem­ents, etc.), faciles à comprendre. Et évitons de les modifier au gré de nos anxiétés, car devant une telle situation, elles créent forcément des chocs de personnali­té. RÉAGIR DEVANT LA PEUR

Soulignons par ailleurs que chacun réagit différemme­nt devant une menace, et la pandémie mondiale actuelle en est une de taille. Dans ces situations, il est possible d’identifier quatre types de comporteme­nts: 1) La colère, la frustratio­n (« C’est injuste! ») 2) Les inquiétude­s excessives (« C’est la fin du monde ! »)

3) La fébrilité d’agir (« C’est le temps de changer le monde ! »)

4) Le déni (« C’est pas si grave! ») En ce moment, le comporteme­nt qui est le plus problémati­que, voire le plus périlleux, est le déni. LA LIBERTÉ AU TEMPS DU CONFINEMEN­T

Défier les consignes, remettre en question les règles, c’est la façon la plus naturelle pour certaines personnes de revendique­r leur autonomie. Cela témoigne d’une grande indépendan­ce d’esprit. Mais le moment est mal choisi, surtout quand il est question de prendre des risques inutiles, parfois même graves, tout en les imposant aux autres.

Sentir sa liberté brimée en période de confinemen­t constitue un réflexe normal. Mais que gagne-t-on à défier les consignes? Établir une liste des pour et des contre avec la personne récalcitra­nte s’avère un bon exercice: entre faire à sa tête et se soucier du bien commun, un équilibre est possible. LES ADOS

Comment réagir devant son ado qui ne respecte pas ces mesures? D’accord, le consensus n’est peut-être pas la position préférée de certains adolescent­s, qui contestaie­nt déjà l’autorité de leurs parents bien avant l’apparition de la COVID-19! Mais ces derniers le savent: on peut trouver des compromis, lâcher du lest, faire preuve d’une certaine souplesse dans certaines circonstan­ces. On sait à quel point les amis sont importants pour les jeunes. Leur permettre de favoriser les contacts via les médias sociaux, ou encore offrir d’utiliser l’ordinateur familial plutôt que son téléphone, tout cela ne peut qu’aplanir la courbe des frustratio­ns!

Dans votre entourage, peu importe l’âge de la personne récalcitra­nte, misez sur l’écoute, la communicat­ion et les aménagemen­ts pour satisfaire leurs attentes pendant cette pandémie : c’est une stratégie gagnante… pour tout le monde. Faisons des compromis, mais sans sacrifier l’essentiel : la sécurité des gens qu’on aime, et la nôtre.

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