Le Journal de Quebec - Weekend
LE RÊVE DE DENIS VILLENEUVE
L’adaptation cinématographique du monument romanesque de Frank Herbert, Dune, arrive sur les écrans en décembre. Attendue avec une impatience grandissante, cette nouvelle lecture par Denis Villeneuve s’annonce éblouissante à plus d’un titre.
En août dernier, les médias ont été invités à prendre part à une conférence de presse en différé avec Denis Villeneuve et ses acteurs. À l’occasion de cette discussion animée par Stephen Colbert, ils ont dévoilé plusieurs des secrets de tournage de Dune, sont revenus sur leurs personnages et ont souligné la pertinence du film en ces temps inhabituels.
Dans ce premier volet (une suite est prévue, Denis Villeneuve ayant souligné que son long métrage couvrait environ la moitié du premier volume), Paul Atréides a 15 ans et s’apprête à déménager, avec les siens, sur Arrakis. Aussi appelée Dune, la planète peuplée par les Fremen est un désert qui produit l’épice, précieuse ressource dans l’Empire. Paul devra apprendre à manoeuvrer entre les intrigues politiques, les Harkonnen – ennemis jurés des Atréides – et créer de nouvelles alliances.
S’IDENTIFIER AUX PERSONNAGES
Choisi par Denis Villeneuve en raison de « son charisme, celui des stars de cinéma des années 1920 », Timothée Chalamet a découvert Dune en apprenant que le cinéaste allait porter le roman au grand écran. De son rapport à Paul, futur meneur de tout un monde, l’acteur a dit que « lorsqu’on tourne dans le désert de Jordanie, la spiritualité du lieu nous enveloppe. Je vais malheureusement trahir mes sentiments en les exprimant… On sent l’environnement. »
« J’ai eu l’impression de revenir aux origines de tout cela », n’a pu s’empêcher de commenter Oscar Isaac en faisant référence à son rôle de Poe Dameron dans la nouvelle trilogie Star Wars .«Leducestunpère, il en a toutes les qualités. Il est noble […], les Atréides sont la référence en matière d’éthique et de conscience supérieure. Il est aussi humain et maudit. »
Zendaya, pour sa part, a qualifié son expérience de tournage de « magique. J’ai toujours voulu faire partie d’un projet aussi immense ».
L’ÂGE DE SON HÉROS
« J’avais l’âge de Paul Atréides, j’avais 15 ans quand j’ai lu Dune ,a dit Denis Villeneuve. J’ai trouvé le roman par hasard dans une librairie et je suis tombé profondément amoureux. À l’époque, j’avais besoin d’aventure, de profondes aventures humaines avec une pointe de science-fiction. C’est une histoire humaine très puissante et j’ai été happé dès les premières pages. J’ai lu toute la saga, je suis devenu fan. J’étais obsédé par Dune. C’est quelque chose qui est resté avec moi pendant toutes ces années. À l’époque, je rêvais aussi de faire du cinéma et j’ai senti qu’il y avait là un potentiel énorme. »
Roman de science-fiction le plus vendu au monde, Dune a marqué le genre, de Star Wars à Star Trek ou Le trône de fer, influençant même Hayao Miyazaki. « Le roman comprend tellement de thématiques ! C’est ce qui le rend aussi riche. Nous avons essayé, dans le film, de conserver cette richesse », a indiqué le cinéaste, coscénariste et également l’un des producteurs.
Obtention et conservation du pouvoir, religion et spiritualité, exil, loyauté, écologie, prédestination… les sujets abordés par Dune sont trop nombreux pour être tous mentionnés et Denis Villeneuve n’a pas privilégié un aspect. Pour lui, l’histoire en est une « de devoir mériter notre destin pour changer le monde. Le film est, pour moi, un appel à passer à l’acte, surtout pour les jeunes ».
« Les éléments de science-fiction et fantastiques ne sont qu’un arrière-plan. Je me suis concentré sur le cheminement, je me suis concentré sur l’aspect d’aventure humaine. Ce qui rend Dune aussi puissant, c’est que c’est une extraordinaire histoire humaine. C’est une ode à l’esprit humain, un hommage aux qualités humaines. […] En son coeur, Dune est une histoire d’écosystèmes, d’écologie. »
Avant même le premier tour de manivelle, Denis Villeneuve savait qu’il voulait tourner dans des décors naturels. « Lorsque le public verra le film, il sera stupéfié par les paysages et, étrangement, il se sentira chez lui. »
Quand on a rappelé à Denis Villeneuve les attentes des fans avec lesquelles il devait composer, pression avec laquelle il a déjà eu à composer pour Blade Runner 2049, il a expliqué ne pas ressentir les attentes de la même manière.
APPEL AU CHANGEMENT
« Ce sont deux pressions totalement différentes. Pour Blade Runner 2049, je me devais d’être respectueux de l’univers de Ridley Scott, de ce chef-d’oeuvre, c’était un acte d’amour envers le travail de Ridley. Là, c’est complètement différent. Je dois composer avec la pression des rêves que j’avais adolescent. Et je rêvais en grand quand j’étais ado. J’avais des rêves immenses. J’ai réalisé que cet adolescent est un tyran et qu’il fallait que je satisfasse mes rêves. Mon plus grand défi a été celui-là. »
À la question de savoir pourquoi 2020 était le moment idéal pour que Dune sorte sur les écrans, Denis Villeneuve a souligné que c’est parce que le film « est un appel au changement. C’est un film sur la capacité d’adaptation, que ceux qui survivent sont ceux qui peuvent changer et s’adapter. Des changements énormes vont se produire dans les décennies à venir en raison des changements climatiques. Nous allons avoir besoin de changer notre manière d’appréhender la nature et le monde qui nous entourent. Et cela nécessite énormément de courage et d’efforts.»