Le Journal de Quebec - Weekend
POUR RESTER JEUNE, MANGEZ MOINS !
Une réduction de l’apport calorique réduit l’accumulation de cellules inflammatoires dans les organes et atténue l’expression de certains gènes associés au vieillissement, deux facteurs clés impliqués dans le déclin des fonctions physiologiques avec l’âge
Le vieillissement est associé à une diminution progressive de la fonction de plusieurs organes, augmentant du même coup le risque de développement de plusieurs maladies chroniques (cardiovasculaires, le diabète de type 2, différents types de cancers, des maladies neurodégénératives comme l’Alzheimer).
Si vieillir est inévitable, l’apparition de ces maladies ne l’est pas pour autant : on sait depuis plusieurs années que des facteurs du mode de vie comme l’absence de tabagisme, une activité physique régulière, une alimentation principalement composée de végétaux et le contrôle du poids corporel peuvent grandement diminuer le risque de développer ces maladies et améliorer l’espérance de vie en bonne santé.
RESTRICTION CALORIQUE
La restriction calorique (diminution de l’apport en énergie, mais sans carence en vitamines et minéraux essentiels) est un autre facteur qui suscite énormément d’intérêt.
Un très grand nombre d’études ont en effet clairement montré qu’une diminution de l’apport calorique augmente de 30 à 50 % la longévité de plusieurs organismes simples (levures, drosophiles, vers) et de différentes espèces de mammifères (rongeurs, primates) (1). Par exemple, chez les singes rhésus (qui possèdent un génome identique à 93 % au nôtre, la restriction calorique est associée à une diminution de l’incidence du diabète de type 2, des maladies cardiovasculaires, du cancer, des neurodégénérescences, ainsi qu’à une augmentation de la longévité [2].
INFLAMMATION EN BAISSE
Une étude récente suggère que ces améliorations seraient une conséquence des effets directs de la restriction calorique sur l’expression de plusieurs gènes impliqués dans le vieillissement [3].
Pendant environ une année, les chercheurs ont nourri des rongeurs avec un régime normal ou un régime hypocalorique [calories réduites de 30 %] et ont par la suite isolé des deux groupes d’animaux pas moins de 168 703 cellules provenant de 40 organes différents. En utilisant une technique qui permet de séquencer les gènes présents dans chacune des cellules, ils ont remarqué que plusieurs des changements qui survenaient au cours du vieillissement des animaux nourris normalement ne se produisaient pas chez ceux soumis à la restriction calorique.
Ce phénomène est particulièrement prononcé pour les gènes impliqués dans l’inflammation : par exemple, alors que le nombre de cellules inflammatoires [les neutrophiles en particulier] présentes dans les organes augmente fortement chez les animaux qui étaient nourris normalement, cette hausse n’est pas du tout observée chez ceux dont l’apport calorique était réduit.
Autrement dit, les cellules des animaux âgés qui mangent moins ressemblent à celles des plus jeunes ! Puisque l’inflammation chronique est une véritable bougie d’allumage de l’ensemble des maladies chroniques, cela suggère qu’une réduction calorique pourrait représenter une façon simple de réduire cette inflammation et diminuer le risque de ces maladies.
MANGER MOINS
Il ne faut pas se le cacher, l’omniprésence de nourriture dans notre environnement fait en sorte que manger moins représente tout un défi pour la plupart des gens.
Défi rendu encore plus difficile par le fait que plus de la moitié des calories consommées par les Canadiens proviennent d’aliments industriels ultratransformés : la très forte densité calorique de ces aliments court-circuite nos systèmes de satiété et cause une surconsommation de calories qui entraîne l’accumulation de graisse.
Réduire la consommation de ces aliments au profit d’aliments naturels, non transformés industriellement, représente donc une première étape intéressante pour toute personne qui cherche à diminuer son apport calorique.
Une autre approche, de plus en plus étudiée, est de faire alterner des périodes où l’apport alimentaire est normal avec des périodes de jeûnes plus ou moins prolongées, ce qu’on appelle le jeûne intermittent.
Une forme répandue de ce type de jeûne est l’alimentation limitée dans le temps [time-restricted feeding ]oùon limite l’apport calorique à une période de la journée, par exemple en sautant le petit déjeuner ou en soupant tôt, suivie d’un jeûne de plus de 12 heures qui inclut la période de sommeil.
Plusieurs études précliniques ont montré que ce type d’alimentation diminue l’inflammation, améliore la sensibilité à l’insuline et prévient ou retarde la progression de plusieurs maladies chroniques [4].
■ [1] FONTANA L ET L PARTRIDGE. PROMOTING HEALTH AND LONGEVITY THROUGH DIET: FROM MODEL ORGANISMS TO HUMANS. CELL 2015; 161 : 106–118.
■ [2] MATTISON JA ET COLL. CALORIC RESTRICTION IMPROVES HEALTH AND SURVIVAL OF RHESUS MONKEYS. NATURE COMM. 2017; 8 : 14 063.
■ [3] MA S ET COLL. CALORIC RESTRICTION REPROGRAMS THE SINGLE-CELL TRANSCRIPTIONAL LANDSCAPE OF RATTUS NORVEGICUS AGING. CELL 2020; 180 : 984-1001.
■ [4] MATTSON MP ET COLL. IMPACT OF INTERMITTENT FASTING ON HEALTH AND DISEASE PROCESSES. AGEING RES. REV. 2017; 39 : 46-58.