Le Journal de Quebec - Weekend
UNE HISTOIRE D’AMITIÉ ET DE RÉDEMPTION
Plus loin que l’hiver, le nouveau roman de l’écrivaine américaine d’origine chilienne Isabel Allende, est profondément ancré dans l’actualité. À travers une belle histoire d’amitié et de rédemption, il aborde les thèmes de l’identité et des migrations. L’
Lucia Maraz, une Chilienne expatriée au Canada pendant la dictature de Pinochet, porte encore les profondes cicatrices de son passé. Au cours des premières années du régime, son frère a été porté disparu et elle ne s’en est jamais remise. Elle a aussi affronté un divorce et un cancer.
Lucia a toujours continué d’avancer et s’est retrouvée à l’université de New York comme professeure invitée. Installée dans le sous-sol de la maison « brownstone » d’un collègue un peu bourru, le professeur Bowmaster, elle entame un nouveau chapitre de sa vie.
Grognon, en marge de la société, Richard Bowmaster a vécu plusieurs deuils et, pour garder sa raison, s’est imposé une routine sécurisante dont il ne déroge jamais. Lorsqu’une tempête de neige monstre fait rage sur New York, un banal accrochage avec un autre véhicule va le catapulter dans un autre univers. La jeune femme au volant de l’autre véhicule est une immigrée guatémaltèque sans papiers. Il demande à Lucia de l’aider… et ce que la jeune Evelyn Ortega va leur révéler va lier leur destinée à jamais.
BROOKLYN ET SON HISTOIRE
Dans ce nouveau roman, on retrouve toute la beauté et la profondeur de la plume d’Isabel Allende, son humanité, ses valeurs profondes, son pouvoir d’évocation. Le livre, explique-t-elle, est né au cours d’une réunion de famille à Brooklyn, d’où vient sa belle-fille. « Quelqu’un m’a suggéré d’écrire sur Brooklyn, à propos de ce quartier où la mafia se trouvait », raconte-t-elle, en entrevue.
« Je n’y ai pas porté trop attention, parce que ce n’est pas ma façon de travailler. Mais quand j’ai commencé à écrire, le 8 janvier, tout m’est revenu en tête : Brooklyn, les crimes et les jeunes femmes que j’ai connues à travers ma fondation. »
Plus loin que l’hiver n’est pas autobiographique, assure-t-elle, bien qu’il demeure très personnel. « J’ai créé le personnage de Lucia en m’inspirant de mes amies journalistes qui sont restées au Chili après le coup militaire. Le frère de l’une d’elles a disparu pendant les événements. » Le personnage de Richard Bowmaster, cependant, est inspiré de son frère Juan, « qui est exactement comme lui ».
LES SANS-PAPIERS
Isabel Allende a parlé de sa famille et du coup militaire dans plusieurs de ses livres, mais cette fois, elle dénonce à travers le personnage d’Evelyn Ortega les conditions de travail misérables de nombreuses femmes latino-américaines sans papiers.
« J’ai une fondation et nous travaillons beaucoup avec les réfugiés. La plupart viennent du Guatemala, du Salvador et du Honduras. Plusieurs viennent du Guatemala parce que les gens là-bas sont désespérés. Le pays est sous la gouverne des narcotrafiquants, du trafic de drogue, des gangs, d’une police corrompue, d’un gouvernement complètement inefficace et d’une longue histoire d’abus envers les populations autochtones. »
PERSONNES VULNÉRABLES
« J’aime l’histoire d’Evelyn parce qu’elle décrit, d’une certaine façon, ce qui arrive aux personnes sans papiers. Elles sont victimes d’abus dans leur travail parce qu’elles ne sont pas représentées. »
« Ces personnes sont très vulnérables et j’avais envie de raconter leur histoire, tellement commune de nos jours. Qui voudrait quitter son pays, sa famille, ses terres, et pourquoi ? Ces gens veulent sauver leur peau. C’est ça que les gens ne comprennent pas. »