Le Journal de Quebec - Weekend
J’AI JAMAIS VOULU ÊTRE HUMORISTE DE MA VIE ! »
Yvon Deschamps n’aurait peut-être jamais connu sa glorieuse carrière en humour, n’eût été Robert Charlebois. Dans les années 1960, le comédien qu’il était travaillait aux côtés de Paul Buissonneau, Louise Latraverse, Claude Léveillée et JeanLouis Millette dans le nouveau Théâtre de Quat’Sous.
En 1968, avec Latraverse, Robert Charlebois et Mouffe, Yvon Deschamps présentait
L’Osstidcho dans ce même théâtre. « J’avais à écrire un sketch dans le spectacle, et c’est Robert qui m’a dit de faire un monologue », se souvient Yvon. C’est alors qu’est né le célèbre monologue
Les unions, qu’ossa donne ?. « Ç’a changé ma vie complètement, dit Yvon. Pour Robert aussi, L’Osstidcho a changé sa vie. C’est devenu un phénomène musical et social. »
« The rest is history », comme on dit. Yvon Deschamps, alors âgé de 33 ans, allait commencer une prolifique carrière en humour. Dès le début, il se faisait un plaisir de bousculer les foules. « Les deux premières années, j’ai fait des centaines de spectacles. Il n’y en a pas un où il n’y a pas des gens qui sont sortis fâchés ! » dit-il avec le sourire.
Pendant les 15 premières années de sa carrière en humour, Yvon Deschamps a donné une moyenne de 180 représentations par année. « J’ai écrit huit spectacles solos, j’ai créé cinq shows de gang et fait un film », se souvient-il.
En 1983, il annonçait son « spectacle d’adieu ». « Je pensais vraiment avoir fait le tour. J’avais écrit tout ce que je pouvais. »
En 1985, il se tournait vers le petit écran en participant à la populaire émission à sketches, Samedi de rire. Mais quelques années plus tard, il vivait l’un de ses rares échecs avec CTYVON, qui n’allait durer qu’une saison.
UN FILM AVORTÉ
Dans ces mêmes années, Yvon Deschamps avait écrit un scénario de long métrage, dans lequel il voulait jouer avec Jean Lapointe. « Je l’avais montré à Jean et il était gêné de me dire qu’il n’aimait pas ça, dit Yvon. C’est finalement son producteur, Jean-Claude Lespérance, qui m’a dit que ce ne serait pas bon pour la carrière de Jean de faire ce film-là à ce moment-là. Je trouvais pourtant qu’il y avait de bonnes affaires. J’aimais beaucoup le titre : Quand est-ce qu’on va devenir riches, on travaille tout le
temps (rires). »
Après avoir arrêté la scène et connu des revers à la télévision et au cinéma, Yvon Deschamps ne savait plus quoi faire professionnellement. « Je me souviens d’un soir, j’étais dans mon bureau-salon, à la noirceur. Notre deuxième fille, Karine, qui n’avait que huit ou neuf ans, est venue me voir avant de se coucher. “Que fais-tu ?”, m’avait-elle demandé. Je lui avais répondu que je pensais à ce que j’allais faire. J’avais une idée pour une autre série télé et je me disais que j’allais peut-être commencer à l’écrire. “Retourne sur scène, c’est là que t’es bon”, m’avait-elle dit. J’ai écrit un autre show !»
DERNIER SPECTACLE
Huit ans après avoir arrêté la scène, Yvon Deschamps revenait avec le spectacle U.S. qu’on s’en va ?. Au milieu des années 1990, il était pleinement de retour dans le milieu de l’humour. « J’ai fait les galas Juste pour rire de 1993 à 1996, dit-il. Il y a une année où j’ai animé les cinq galas francophones. Ça prend juste un fou comme moi pour faire ça ! Demande à n’importe qui aujourd’hui de faire cinq galas de suite de trois heures, il va dire : es-tu malade, toi ? »
En 2000, Yvon Deschamps présentait ce qui allait être son dernier spectacle : Comment ça, 2000 ?. « Au départ, c’était un show d’été que je jouais devant 300 personnes au Manoir [Rouville, un établissement qu’il avait acheté à Mont-Saint-Hilaire]. J’avais invité mes amis à venir le voir, comme Guy A. Lepage, [Normand] Brathwaite, [Claude] Meunier. Ils me disaient tous d’amener ça à Montréal. »
Il l’a finalement joué en tournée 400 fois, pendant deux ans et demi, dont 100 représentations au Théâtre Corona, à Montréal.
« J’ai jamais voulu être humoriste de ma vie ! lance Yvon. Ça m’est tombé sur la tête un matin et j’ai été pris avec ça. Ç’a marché et marché. J’ai raté ma vie probablement. C’était peut-être pas ça que je devais faire (rires) ! »