Le Journal de Quebec - Weekend

LES AMOUREUX DES LAURENTIDE­S

À travers La Diaspora des Desrosiers etles Chroniques du Plateau-Mont-Royal, les lecteurs de Michel Tremblay connaissen­t déjà les secrets de cette famille, dévoilés bribe par bribe au fil des livres. Dans Victoire !, son nouvel opus, Michel Tremblay remon

- VICTOIRE ! Michel Tremblay Coédition Leméac/Actes Sud environ 136 pages MARIE-FRANCE BORNAIS

Après avoir passé sept longues années au couvent en vue de devenir religieuse, Victoire décide de rentrer à Duhamel pour retrouver son frère Josaphat. Comme elle, il est orphelin depuis le décès de leurs parents dans l’incendie de l’église du village.

Donnant voix à Victoire, Michel Tremblay raconte dans cette élégie romanesque ce qui s’est passé. De leur union vont naître Albertine, puis Gabriel, le mari de la Grosse femme et le père de Jean-Marc, alias Michel Tremblay. Cette histoire n’avait jamais été vraiment racontée, et l’écrivain le fait avec jubilation, sincérité et une très grande intensité.

Son éditrice, la regrettée Lise Bergevin, lui demandait souvent d’écrire un livre racontant la genèse de Victoire avec son frère. « C’est la genèse de la genèse de tout ce que j’ai écrit, dit Michel Tremblay en entrevue. Quand elle est partie, en juillet de l’année dernière, je me suis dit, ah oui… Non seulement je lui dois ça, mais je me le dois à moi aussi et à toute l’espèce d’immense saga que j’ai écrite depuis 50 ans. »

Dans La Diaspora des Desrosiers ,il était remonté jusqu’en 1902 et, cette fois, il est allé à la source de Gabriel, jusqu’en 1898. « Au lieu de parler de la naissance de Gabriel, je suis allé à la rencontre du frère et de la soeur qui ne s’étaient pas vus depuis sept ans et qui tombent en amour. »

L’histoire est touchante et les personnage­s, extrêmemen­t vibrants. « J’ai appelé cela un roman élégiaque : je voulais que ce soit un demi-pouce au-dessus du plancher. Je voulais donner à la voix de Victoire une espèce de poésie, du plus grand que nature, une transcenda­nce et, en même temps, une petite touche de tristesse aussi. Une élégie, on trouve ça magnifique, mais ça serre le coeur un peu. »

Michel Tremblay évoque la belle nature et les paysages de Duhamel, dans les Laurentide­s. « C’est la seule campagne que j’ai connue quand j’étais petit. La première fois que j’y suis allé, j’avais peut-être 1012 ans – je n’étais jamais sorti de la ville de ma vie. Ma tante Tina avait une maison de campagne qui est la maison que je décris, à Duhamel. »

« Victoire !, c’est la redécouver­te de la campagne par une fille qui vient de là, mais qui a été enfermée dans un couvent avec des soeurs pendant sept ans et qui tout à coup fait un retour aux sources. La présence de la nature, ça lui revient, et je voulais retrouver cette espèce d’innocence devant tant de beauté. Je voulais que ce soit très présent et très fort dans le roman. »

Michel Tremblay note qu’il parle toujours de la nature dans ses romans. « Elle a été là depuis La Traversée des sentiments, depuis 2010. »

Les paysages transposen­t les émotions. « Duhamel, c’est encore très beau. D’ailleurs, j’y suis allé dernièreme­nt et j’ai retrouvé la maison suspendue. Je savais exactement où elle était, à un mille du village, et je m’en souvenais parce que la clôture était en diagonale. La barrière était ouverte et on est allés. La dame qui vivait là m’a reconnu. Je lui ai dit : Ma grandmère est morte ici. Et elle m’a dit : Ben oui, je le sais ! Ça a été une grande émotion de retrouver cette maison. »

Chroniqueu­r prolifique, dramaturge dont les pièces sont jouées dans le monde entier, Michel Tremblay est l’un des écrivains les plus importants de sa génération.

Le cycle des Belles-Soeurs, les Chroniques du PlateauMon­t-Royal et La Diaspora des Desrosiers appartienn­ent au corpus des oeuvres majeures de la littératur­e francophon­e actuelle.

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