Des musulmans POUR la laïcité
Hier, à l’émission que j’anime sur les ondes de LCN, je discutais de la Charte des valeurs québécoises avec le politologue Christian Dufour et l’ex-député péquiste Jonathan Valois.
«Jusqu’où devrait-on pousser le concept de neutralité de l’État? demandais-je. Devrait-on aller jusqu’à interdire le port de signes ostentatoires par les infirmiers, les commis de la SAAQ, les vendeurs de la SAQ?»
PAS UN CRIME
On débattait de ces questions lorsqu’un téléspectateur prénommé Mustapha a appelé pour faire part de ses commentaires.
«Je suis musulman, nous a-t-il dit. Ma femme et mes filles ne portent pas le voile. Pour nous, la religion est d’abord une affaire privée. Vous n’avez pas à porter de signes ostentatoires au travail. Demander à une musulmane d’enlever son voile pendant ses heures de travail n’est pas un crime...»
Qui a dit que seuls les Québécois «de souche» défendaient la laïcité? Et que tous les musulmans établis au Québec voyaient la laïcité d’un mauvais oeil?
CONTRE LES ACCOMMODEMENTS
Preuve que Mustapha n’est pas seul dans son coin: hier, sur le site féministe Sisyphe.org, deux immigrants d’origine algérienne (Akli Ourdja et Ali Kaidi) prenaient la plume pour annoncer la naissance d’un nouvel organisme: l’Association québécoise des Nord-Africains pour la laïcité (AQNAL).
«La laïcité est un projet de société important pour la paix sociale au Québec ainsi que pour l’inclusion et l’intégration harmonieuse des nouveaux arrivants, peut-on lire. Plusieurs s’opposent aux accommodements religieux déraisonnables qui sont en fait une ouverture à une discrimination dont personne ne peut mesurer les conséquences dramatiques sur la cohésion sociale.»
«Ces accommodements sont, en réalité, la demande d’une très petite minorité d’entre nous, mais ils font beaucoup de tort aux personnes qui proviennent de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, car ces accommodements religieux ouvrent la porte à la création d’un clivage entre les immigrants et la société d’accueil.»
«La laïcité nous permet de mettre de l’avant ce qui nous rassemble et non ce qui nous divise, à savoir la neutralité de l'État et de ses institutions, l’égalité entre les hommes et les femmes, la primauté de la citoyenneté sur l’appartenance religieuse, et la fin de tous les privilèges liés à cette dernière.»
«Non à la discrimination entre les citoyens, non à l’intégrisme religieux, oui à l’égalité totale entre les femmes et les hommes, oui à la laïcité!»
« Demander à une musulmane d’enlever son voile pendant ses heures de travail n’est pas un crime »
DANS LE MÊME SAC
Pour l’instant, je ne sais pas combien de musulmans sont membres de cette jeune association. Mais je suis sûr qu’il y en a plus que nous le pensons.
Les commentateurs qui passent leur temps à pourfendre la Charte du ministre Drainville ont tendance à mettre tous les musulmans dans le même sac. À les entendre, la communauté arabo-musulmane au grand complet trouve cette charte discriminatoire. C’est faux. Complètement, totalement et absolument faux. Akli Ourdja a été un membre fondateur d’un syndicat d’enseignants en Algérie. Ali Kaidi a enseigné la philosophie à l’Université d’Alger.
Cessons de dire que le combat pour la laïcité et la neutralité de l’État est un combat d’arrière-garde mené par des Québécois frileux et xénophobes qui ont une peur bleue des étrangers.
Ce n’est pas vrai!