J’y perds mon latin
Hier, la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), qui représente 32 000 profs, a affirmé qu’elle s’opposait à l’interdiction du port de signes religieux à l’école – qu’ils soient ostentatoires ou non.
«Ce sont les institutions qui doivent être laïques, a expliqué le président de la FAE, pas les individus.»
En d’autres termes: l’école doit être laïque, mais les profs peuvent afficher leurs croyances religieuses comme ils le veulent.
Comprenne qui pourra.
LAÏCITÉ DE BÉTON
Comme m’a très justement lancé Jonathan Valois: «C’est de la laïcité de béton. Tu n’as pas le droit d’accrocher un crucifix sur le mur, mais tu peux t’en mettre un autour du cou, pas de problème!»
Le plus drôle, c’est que la FAE affirme que le gouvernement Marois manque de cohérence en voulant interdire les signes ostentatoires dans les institutions publiques, sauf le crucifix à l’Assemblée nationale.
Mais n’est-ce pas AUSSI un manque de cohérence que d’interdire les signes religieux sur les murs des écoles, mais pas sur les vêtements des profs? Ou l’école est laïque ou elle ne l’est pas! Une porte ne peut pas être à la fois ouverte et fermée.
Qu’est-ce qu’un prof sinon un représentant de l’école? Dire qu’un prof n’est pas un représentant de l’école, c’est comme dire que la croix n’est pas un signe religieux, mais un «symbole historique et patrimonial».
C’est jouer sur les mots et éviter d’appeler un chat un chat.
Bref, la FAE critique le gouvernement... Mais fait exactement ce que fait le gouvernement!
Elle prône la neutralité de l’État tout en ouvrant la porte à la religion dans les institutions publiques!
C’est à y perdre son latin…
CLAIR ET NET
En France, au moins, on est cohérent. On n’applique pas les principes de laïcité qu’au béton, aux chaises ou aux bureaux: on l’applique aussi aux gens!
Les profs, en tant que représentants de l’école, ne peuvent porter AUCUN signe religieux.
«Les agents contribuant au service public de l’éducation, quels que soient leur fonction et leur statut, sont soumis à un strict devoir de neutralité qui leur interdit le port de tout signe d’appartenance religieuse, même discret, affirme la loi du 15 mars 2004. Ils doivent également s’abstenir de toute attitude qui pourrait être interprétée comme une marque d’adhésion ou, au contraire, comme une critique à l’égard d'une croyance particulière.»
Pas de tataouinage, de «Non sur les murs, mais oui sur ta tête». C’est clair et net. Quant aux élèves français, ils peuvent porter des signes discrets qui «ne conduisent pas à se faire immédiatement reconnaître par son appartenance religieuse».
UN PEU DE COHÉRENCE !
Personnellement, je suis d’accord avec la position de la FAE sur le crucifix de l’Assemblée nationale: on ne peut pas dire aux gens «on ne veut pas de signe religieux ostentatoire» tout en gardant un signe religieux ostentatoire dans le Salon bleu!
Ce serait comme vanter les vertus du végétarisme en grignotant un jarret d’agneau.
Mais de même, on ne peut pas déclarer l’école laïque… tout en permettant aux représentants de celle-ci d’afficher leur appartenance religieuse!
Un peu de cohérence, bon Dieu!