Le ras-le-bol de la pharmacienne
Cela s'est fait naturellement: plus le système de santé s'est engorgé, plus les gens se sont tournés vers leurs pharmacies de quartier pour des conseils et services. Le pharmacien est le professionnel de la santé le plus accessible au Québec. En quelques minutes au lieu de plusieurs heures d'attente dans une clinique ou à l'urgence, un patient peut obtenir beaucoup de réponses à ses questions et des soins appropriés, et ce, 7 jours sur 7, le jour et le soir. C'était un système performant qui n'avait aucunement besoin de la loi 28.
Au lieu de cela, ce gouvernement sabre un montant important dans les revenus de chaque pharmacie communautaire. En suivant les lois du marché, les pharmacies s'étaient adaptées et avaient pu donner un service de qualité et rentable pour tout le monde. Cependant, en imposant sa vision bureaucratique des choses, sans connaissance du rôle des pharmaciens, ce gouvernement met en danger une proportion importante des pharmacies du Québec. En effet, ce sont 460 pharmacies qui seront en situation précaire avec l'imposition de la loi 28. Ce parti «libéral» trouve le moyen de foutre en l'air une des rares choses qui fonctionnaient encore bien dans le système de la santé!
En contrepartie de ces coupes, par la loi 41, on nous propose de mettre en jeu notre responsabilité professionnelle pour de nouveaux actes non payés. (Il manquera toujours plus de 100 000 $ dans notre budget). On veut que l’on travaille davantage avec du temps et du personnel en moins, car nous devrons couper sur les heures d’ouverture et le personnel pour assurer la santé de l’entreprise et éviter les fermetures pour certaines pharmacies. Plus de responsabilités pour du bénévolat, vous accepteriez cela, vous? Moi non plus.
La loi 41, faute de moyens adéquats pour la réaliser, sera un échec. Ces nouveaux actes auraient pu contribuer à désencombrer le système pour une population qui en a fortement besoin. Pire encore, les services qui étaient gratuits ne le seront plus. Le ministre Barrette n’a pas le courage d’assumer cette conséquence néfaste pour le patient et veut en faire porter l’odieux aux pharmaciens. On a eu droit à des mois de fausses négociations avec un gouvernement qui n’a pas bougé d’un pouce. Tout ce que l’on a obtenu de ce gouvernement, c’est de l’incompréhension, de la condescendance et un paternalisme à la limite du mépris.
Si, au moins, tous dans le système étaient mis également à contribution! Mais non, l’austérité semble sélective! C’est le pharmacien qu’on pénalise, ainsi que les patients, alors que ce professionnel est la solution des problèmes de qualité des soins et d’accessibilité au Québec. Mais cela ne sera plus possible désormais avec cette coupe drastique mettant fin à un système des plus fonctionnels.
Le pire dans tout cela, c’est que l’on n’aura plus le temps de s’occuper autant des personnes âgées et vulnérables vivant à domicile. Toutes ces personnes seules et sans famille, qui se tournaient vers nous, qui maintenant pourra les encadrer efficacement dans leur prise de médicaments? Par conséquent, les visites aux urgences augmenteront, aux frais du gouvernement. C’est en faisant des lois mammouths improvisées, sans réelles consultations, que le gouvernement verra les coûts en santé augmenter au lieu de diminuer. C’est ça, la «compétence» de ce gouvernement.
La démotivation s’installe en moi quand je vois tout le saccage dans les acquis québécois, que ce soit en santé ou en éducation. On s’attaque toujours aux plus démunis et aux plus vulnérables de la société. Ce gouvernement est une honte!
J’en ai ras le bol! Vous m’entendez?
Thina Nguyen, pharmacienne Montréal