Référendum grec
Aujourd’hui, il y a un référendum en Grèce. Il y a un camp du Oui et un camp du Non. On ne sait trop qui gagnera. Ces derniers jours, le premier a repris des plumes et le second s’est vu fragilisé. Il y a toutefois une nuance: on ne sait pas exactement quelle est la question.
Officiellement, les Grecs se prononcent sur les propositions de leurs créanciers. On sait toutefois que le référendum a une tout autre portée. Nous sommes les témoins d’un événement historique.
Acceptent-ils le nouveau plan d’austérité? S’ils votent Oui, les Grecs fe- ront le choix d’un maintien à tout prix dans la zone euro. Il faut dire qu’ils subissent une campagne de peur relevant presque du terrorisme idéologique depuis une semaine.
On leur explique qu’ils doivent se coucher devant la troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et FMI) ou crever. Ils continueront néanmoins de bénéficier de l’aide européenne, aussi toxique soit-elle.
UN SAUT DANS LE VIDE ?
S’ils votent Non, ils se jettent dans le vide. Le premier ministre grec Alexis Tsipras a voulu rassurer son peuple: les Grecs pourront néanmoins conserver l’euro. Ils n’auront pas à retourner à la drachme, leur ancienne monnaie. Sauf que, bien franchement, on n’en sait rien. Surtout qu’ils sont nombreux chez les leaders européens à souhaiter que la Grèce quitte l’euro. Ils la voient comme un fardeau dont ils veulent enfin se décharger.
À gauche et à droite, on aime mutuellement s’accuser de la responsabilité de cette crise. La gauche accuse les banquiers. Et il est vrai qu’ils ont dissi- mulé les combines financières de la Grèce. Tout comme il est vrai que le capitalisme contemporain est devenu fou. La droite accuse le socialisme qui pousse à la ruine. C’est tout aussi vrai.
On ne vit pas au-dessus de ses moyens durablement sans finir par en payer le prix.
Mais l’essentiel est peut-être ailleurs. Et la question se formule aussi simplement qu’aisément: qu’est-ce que la Grèce fait dans la zone euro? N’assistons-nous pas, en direct, à l’éclatement du mirage supranational qu’on cherche à faire avaler de force aux peuples depuis quelques décennies.
Il annonçait la dissolution des nations et l’abolition des frontières, puis la mise en place d’une humanité progressivement unifiée par le marché et les droits de l’homme.
LES NATIONS
L’euro représentait alors un outil pour unifier de force les économies européennes. On constate aujourd’hui, toutefois, qu’une monnaie n’est pas une unité abstraite ou désincarnée. Elle est liée à des réalités économiques et historiques profondes. Fondamentalement, on peut dire de l’euro qu’il a servi l’allemagne, affaibli la France et poussé à la crise les pays du sud de l’europe. Et les nations qui devaient s’effacer redécouvrent aujourd’hui leurs intérêts contradictoires.
La réalité remonte à la surface: il n’y a pas de peuple européen, mais des peuples européens. L’allemagne n’est pas la Grèce. La France n’est pas l’espagne, qui n’est pas l’italie, qui n’est pas la Belgique. Et ainsi de suite. Si on force les nations à cohabiter, chacune subissant péniblement les frasques de sa voisine, les tensions entre elles risquent non seulement de renaître, mais aussi de se radicaliser.
C’est peut-être la grande leçon de la crise grecque: les nations sont de retour.