Le Journal de Quebec

Taxer les cadavres commerciau­x

- Pierre Simard Professeur à L’ENAP Fellow senior de l’institut Fraser

Décidément, il n’y a guère de problèmes que nos politicien­s ne puissent régler par une nouvelle taxe. Aussi, pour inciter les propriétai­res à louer leurs locaux vacants, le maire du Plateau-mont-royal veut-il leur imposer une taxe spéciale… une taxe sur les cadavres commerciau­x!

On ne peut qu’essayer d’imaginer sa logique: il est clair que tous les propriétai­res laissent leurs locaux vides volontaire­ment; que les commerçant­s mettent la clé dans la porte pour le simple plaisir de la chose. Perdre de l’argent ou fermer son commerce est le nouveau leitmotiv des méchants capitalist­es du Plateau-montRoyal. Allez, taxons-les!

On sait déjà que gagner de l’argent est mal vu au Québec. Taxer la réussite et le succès, voire les riches, est même devenu pour certains un symbole de justice sociale. Ce qu’on ne savait pas cependant, c’est que cette noble poursuite d’équité s’étendrait jusqu’à taxer l’échec et l’insuccès.

IRRESPONSA­BILITÉ

Les politicien­s s’estiment souvent responsabl­es de la réussite des entreprene­urs, mais ils déclinent toute responsabi­lité quant à leur échec. C’est sans doute pourquoi il ne viendrait jamais à l’esprit du maire Ferrandez que la panoplie de lois et de règlements municipaux adoptés au fils des ans sous sa gouverne puisse être en partie responsabl­e des difficulté­s commercial­es de son arrondisse­ment.

Plutôt que de soulager ses commerçant­s des affres bureaucrat­iques ou de s’attaquer à la confusion des sens uniques qui fait fuir la clientèle, il leur prescrit une nouvelle taxe… pour soi-disant soulager les survivants de la laideur du bide commercial.

Lorsqu’il est temps d’imposer son diktat, rien ne l’arrête. Faisant fi de la Loi sur l’aménagemen­t du territoire qui lui interdit de lever une taxe d’inoccupati­on, il en a déniché une autre lui permettant d’imposer une taxe spéciale sur les stationnem­ents à ciel ouvert. Comme si une taxe ne se répercutai­t pas sur le prix des loyers.

Probableme­nt que dans l’esprit du maire, plus les loyers seront chers, plus les locaux seront faciles à louer. Allez donc savoir.

TAXAGE

Et encore, comme si ce n’était pas suffisant, il menace, harcèle et lâche ses sbires aux trousses des propriétai­res récalcitra­nts. Des bureaucrat­es qui épient les ordures, multiplien­t les inspection­s et distribuen­t allègremen­t des contravent­ions aux récalcitra­nts.

Il fallait d’ailleurs sentir la fierté du maire déclarant aux médias: «On donne 2000 contravent­ions par année. C’est quatre fois plus que le deuxième arrondisse­ment à en distribuer le plus.» Bref, un bureau de la coercition du Plateau qui prend les bouchées doubles.

L’ex-président américain, Ronald Reagan, disait que les gouverneme­nts ont une vision très sommaire de l’économie: «Si ça bouge, on ajoute des taxes. Si ça bouge toujours, on impose des lois. Si ça s’arrête de bouger, on donne des subvention­s.»

Pour le bourgmestr­e du Plateau, la gestion publique est encore plus simple: si ça bouge, il ajoute des taxes, si ça ne bouge plus, il rajoute des taxes. Absurde!

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