Le Journal de Quebec

Entre l’ombre et la lumière

- MARIE-FRANCE BORNAIS

Matthew Quick, l’auteur de The Silver Linings Playbook, roman porté à l’écran sous le titre Le bon côté des choses (Oscar de la meilleure actrice pour Jennifer Lawrence), s’est intéressé à un sujet très sombre — la détresse et le suicide chez les jeunes — pour écrire un roman extrêmemen­t lumineux et puissant, qui invite à la réflexion: Pardonne-moi, Leonard Peacock.

Matthew Quick n’a pas choisi un sujet facile. Son personnage, Leonard Peacock, est un adolescent perturbé, suicidaire, qui décide un jour de tuer son ex-meilleur ami, puis d’en finir, avec une arme ayant appartenu à son grand-père.

Mais il doit d’abord faire ses adieux aux quatre pers o nnes qui ont compté pour lui: son voisin Walt, obsédé par Humphrey Bogart, Baback, son copain de classe, violoniste virtuose, Lauren, la fille de pasteur dont il est amoureux, et Herr Silverman, qui enseigne l’histoire de l’holocauste à l’école secondaire.

Leonard Peacock va découvrir qu’il doit aller plus loin que la douleur présente pour faire confiance à la vie et mettre l’accent sur les bonheurs qui l’attendent. Il apprend aussi que tous — spécialeme­nt Herr Silverman, dont le bras est tatoué d’un matricule — peuvent témoigner d’une ou deux choses au sujet de la résilience...

Matthew Quick, un écrivain extrêmemen­t doué, n’a pas hésité à explorer ces thématique­s difficiles et très importante­s, s’inspirant de sa propre expérience d’enseignant au secondaire pour écrire ce roman important.

«BEAUCOUP DE RESPONSABI­LITÉS»

«J’ai enseigné l’anglais au secondaire pendant sept ans. Pendant cette période, je suis devenu une sorte de conseiller informel pour les jeunes en difficulté. Je travaillai­s dans un district scolaire où les jeunes étaient considérés comme favorisés. Il flottait un air de perfection­au - dessus de cette ville de la région de Philadelph­ie, mais, comme dans toutes les autres villes, il y avait là aussi des choses dont les gens ne parlaient pas b e au coup » , explique Matthew Quick en entrevue.

«J’ai réalisé, en étant professeur, que j’étais la seule personne avec qui ces jeunes partageaie­nt des pensées sombres. C’était beaucoup de responsabi­lités pour un jeune enseignant de 23 ou 24 ans. Ça me dépassait.»

Matthew Quick se sentait frustré quand survenait une fusillade dans une école et que les médias se demandaien­t ce qui clochait dans le système d’éducation, chez le s e nsei gnants, c hez le s jeunes. «Je voulais, avec mon livre, présenter un portrait d’ un jeune qui est sur la corde raide, très près de commettre un suicide, et peut-être un homicide. Je voulais voir ce qui allait garder Leonard en vie.»

QUESTION IMPORTANTE

Plusieurs petits événements d’apparence anodine comptent beaucoup pour Leonard, ajoute l’écrivain. «Déjeuner avec Walt, c’était bien plus qu’un simple déjeuner: cela démontrait que quelqu’un se souciait de lui. Silverman joue un rôle très important, mais n’aura pas de médaille pour son geste. Pourtant, les enseignant­s font cela tous les jours. Comme enseignant, ce scénario n’était pas choquant à écrire: bien souvent, les ados sont à la limite. Qu’est-ce qui les empêche de passer à l’acte? C’était la question que je posais pour écrire.»

L’écrivain a présenté son manuscrit à plusieurs intervenan­ts et thérapeute­s avant publicatio­n. «Ils n’ont pas fait beaucoup de changement­s», commente-t-il. «J’étais à l’aise avec cette voix, car j’ai travaillé avec plusieurs adolescent­s et j’ai moi-même fait face à l’anxiété et à la dépression quand j’étais jeune. Je n’ai jamais eu de pensées violentes comme Leonard, mais je sais ce que c’est que de se sentir seul et sans espoir. Ce que Leonard souhaite, c’est que quelqu’un reconnaiss­e sa souffrance et prenne le temps de s’asseoir et de parler avec lui. Il veut être entendu.» Matthew Quick est l’auteur de plusieurs ouvrages à succès, dont l’oscarisé The

Silver Linings Playbook, porté à l’écran sous le titre Le bon côté des choses. Il vit sur une des îles qui bordent la Caroline du Nord avec sa femme, la pianiste et romancière Alicia Bessette.

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Matthew QuickPardo­nne-moi,Leonard Peacock, Éditions Robert Laffont, 316 pages
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