Rien n’interdit d’acheter chez nos voisins
Un jugement rendu au Nouveau-brunswick pourrait changer la donne
Le verdict rendu récemment par une cour du Nouveau-brunswick sur le commerce de l’alcool entre les provinces pourrait s’avérer une grande victoire pour les consommateurs de vin et de bière du Québec, estiment des experts.
«Disons que ça ouvre la porte aux achats d’alcool partout au pays sans barrières tarifaires. C’est un jugement très important pour les Québécois, limités actuellement par le monopole de la SAQ», soutient le professeur d’économie à l’université du Québec à Trois-rivières Frédéric Laurin.
Dans son jugement étoffé de 86 pages, le juge Ronald Leblanc, de la Cour provinciale de Campbellton, soutient qu’«une province canadienne n’a pas le droit d’interdire d’acheter, de rapporter ou de faire venir un bien acheté dans une autre province» en s’appuyant sur l’article121 de la Constitution canadienne de 1867.
Selon le juge Leblanc, la loi constitutionnelle de 1867 aurait préséance sur toutes les lois et tous les règlements adoptés depuis par les provinces canadiennes.
ANTICONSTITUTIONNELS
En se fiant à ce jugement, les lois et les règlements du Québec en matière d’achat et de transport d’alcool entre provinces seraient anticonstitutionnels.
«C’est une ouverture majeure pour les consommateurs de vin. Ce qui pourrait remettre en question tout le modèle d’affaires de la SAQ, notamment», croit le chroniqueur en vin et éditeur du site Vinquébec.com Marc-andré Gagnon.
Les vignobles québécois, qui pourront bientôt vendre leurs vins sans passer par la SAQ, accueillent également avec satisfaction ce jugement.
«Ce sont d’importants débouchés qui s’ouvrent avec un tel jugement. Pour nous, c’est très positif. Notre marketing sera fait différemment», souligne le propriétaire du vignoble Domaine Les Brome, en Estrie, Léon Courville.
LES GROS JOUEURS
Le jugement ouvre aussi la porte aux détaillants qui seraient tentés de commander directement à des vignobles canadiens en ne passant plus par la SAQ.
Ce qui permettrait, par exemple, au dépanneur géant Couche-tard ou à l’épicier Metro de commander directement des bouteilles de vin à des producteurs de l’ontario ou de la ColombieBritannique sans barrières tarifaires imposées par la SAQ.
Fait étonnant, même le ministre fédéral de l’économie, Navdeep Bains, a salué la décision des tribunaux du Nouveau-brunswick de déclarer inconstitutionnelle la loi limitant l’importation d’alcool entre les provinces.
Ottawa a dit vouloir travailler avec les provinces afin d’en arriver à la fin des barrières tarifaires provinciales.