Failles de sécurité préoccupantes au Conseil de la magistrature
Les documents qui ont conduit à une perquisition au Journal sont toujours accessibles
À la lumière des nouvelles révélations concernant des failles de sécurité sur le site du Conseil de la magistrature, plusieurs observateurs de la scène judiciaire se disent inquiets que des documents confidentiels y soient si facilement accessibles.
La ministre de la Justice Stéphanie Vallée a dit hier être «préoccupée» par le fait que ces documents soient toujours disponibles sur le site du Conseil, bien que leur consultation ait valu à un reporter du Journal d’être visé par une enquête criminelle qui a mené à la saisie de son ordinateur.
Questionnée à l’assemblée nationale, la ministre a convenu que le Conseil de la magistrature «ne semblait pas être informé que cette documentation-là était accessible aussi facilement». Elle a réitéré que l’organisme est «complètement indépendant» et qu’elle ne peut lui «dicter quoi que ce soit».
Simon Jolin-barrette, porte-parole de la Coalition avenir Québec (CAQ) en matière de justice, a pour sa part répété qu’il avait de «sérieuses réserves» quant à la perquisition effectuée au Journal. En référence au fait que le journaliste visé ait eu accès aux documents par Google, M. Jolin-barrette a indiqué qu’il était «préoccupant que le Conseil de la magistrature n’ait pas un système informatique sécurisé».
Dans la plainte qu’il a déposée auprès de la Sûreté du Québec, le Conseil de la magistrature avançait que le journaliste judiciaire Michael Nguyen avait indûment fait intrusion sur son site pour consulter des documents concernant une enquête sur le comportement déplacé d’une juge.
Or, La Presse démontrait hier qu’on pouvait toujours avoir accès à ces documents soi-disant confidentiels.
PREUVE PEU SOLIDE
Pour la juge à la retraite Nicole Gibeault, soutenir qu’il y a eu une intrusion illégale de la part de Michael Nguyen risque de devenir difficile.
«Je ne suis pas certaine qu’ils vont continuer, a-t-elle indiqué. Je pense qu’ils vont se questionner très sérieusement. S’ils poursuivent, ils vont devoir avoir quelque chose de plus solide.»
Le fait que les informations «confidentielles» du Conseil soient encore fa- cilement accessibles suscite «l’incompréhension totale» de Mme Gibeault.
«Un journaliste aurait commis un acte illégal en consultant ces documents-là. Mais de ce que je comprends, monsieur et madame Toutle-monde peuvent aller dans le site et fouiller dans les documents confidentiels. Alors là, plus personne ne va pouvoir taper les mots: “Conseil de la magistrature” dans Google?» a-t-elle dit.
« AMATEURISME »
Le président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) estime que ces nouvelles informations rendent la perquisition encore plus inadmissible qu’elle ne l’était déjà.
«C’est renversant de voir à quel point il y a de l’amateurisme dans la gestion de ce dossier-là», a dit Jean-thomas Léveillé.
«Il semblerait que le Conseil de la magistrature du Québec cherche des excuses pour justifier la saisie de l’ordinateur d'un journaliste qui faisait simplement son travail», a également réagi Reporters sans frontières.
– Avec la collaboration de Régys Caron et Marc-andré Gagnon