L’euphorie anti-viol
Tout le monde est contre le viol sauf ceux qui s’y livrent. Le viol suscite répugnance et colère.
Le viol est un phénomène qui remonte à la nuit des temps et qui appartient à une conception primitive des rapports entre les sexes. Violer une femme, c’est la considérer comme un objet, une chose, c’est l’instrumentaliser à sa propre pulsion. C’est lui nier son humanité. L’histoire de la sexualité humaine est indissociable de l’histoire des rapports de force que l’homme exerce sur la femme.
En effet, il a fallu des siècles pour parvenir à dompter la bête en l’homme. Les cultures peuvent être qualifiées de civilisées lorsqu’elles se définissent dans le respect des femmes.
ÉGALITÉ DES SEXES
Nous vivons dans un pays exemplaire à plusieurs égards. Les hommes ont été éduqués à respecter les femmes et le machisme ambiant est en recul. Les nouvelles générations de garçons ont baigné dans une culture égalitaire si bien qu’ils sont en majorité aux côtés de leur mère, de leurs soeurs, de leur femme et de leurs filles dans ce combat nécessaire.
Cela étant dit, on assiste au Québec à un mouvement qui laisse croire que la culture du viol s’est enracinée chez nous. Dans les manifestations qui ont suivi la dénonciation d’alice Paquet, victime présumée d’un viol perpétré par le député Gerry Sklavounos, il s’est imposé un vocabulaire qui oblige à reconnaître une réalité dont il faut interroger et les motifs et les retombées.
«La culture du viol» dont il est question suppose une intériorisation des valeurs machistes, lesquelles seraient largement partagées chez nous. Telle n’est pas notre réalité sociale. Certes, nombre de gens ont tendance à sousestimer les agressions sexuelles, à les nier ou à vouloir les envelopper dans un silence criminel.
Mais le Québec ne repose pas sur une culture de viol que l’on retrouve dans plusieurs continents, là où les femmes sont considérées comme légalement ou socialement et individuellement inférieures aux hommes.
DISCOURS IDÉOLOGIQUE
À travers les médias et les réseaux sociaux, les révélations d’alice Paquet, devenue une icône médiatique, sont instrumentalisées par des militantes radicales. Ces dernières encouragent un discours idéologique, qui n’aidera ni les victimes ni toutes ces jeunes femmes qui sont descendues dans la rue dans tout le Québec et qui adhèrent aveuglément à cette thèse de la culture du viol.
La colère et l’émotivité ne peuvent pas tenir lieu d’analyse du phénomène du viol. L’angélisme de nombre de jeunes femmes, qui croient, comme on a pu lire sur des pancartes, que «Les filles n’ont pas à barrer leurs portes», excluant ainsi une sage prudence féminine, joue en leur défaveur.
Devant ces filles solidaires, l’on éprouve des sentiments partagés. L’euphorie et la libération rattachées au bris du silence augurent bien pour l’avenir. Mais cette euphorie ne doit pas enfermer les jeunes femmes dans une position dogmatique où elles en arriveraient à nier la dynamique des violeurs. Ce n’est pas victimiser les femmes que de les mettre en garde contre leur conviction naïve qu’elles ont le bon droit comme armure. C’est plutôt en les prévenant contre elles-mêmes. La lucidité et la conscience sont des armes de défense contre les agresseurs. Mais elles ne font pas disparaître le danger. Car la sexualité est un territoire insondable.