Le maire agresseur de Baie-trinité en appel
Un an et demi après avoir été reconnu coupable d’agression sexuelle, il est toujours en fonction
BAIE-TRINITÉ | Un maire reconnu coupable d’agression sexuelle sur une employée de la municipalité ne se présente qu’à 50 % des séances du conseil municipal tandis que la victime n’a toujours pas repris le travail.
En juillet 2015, le maire de Baie-trinité sur la Côte-nord, Denis Lejeune, a été reconnu coupable d’agression sexuelle envers Caroline Lamarre, une mère de cinq enfants qui travaillait pour la municipalité. Les agressions ont eu lieu dans les locaux du village de quelque 400 résidents. Il présentera son dossier en appel aujourd’hui.
«C’est moi qui suis en prison. J’ai l’impression de faire son temps à sa place», dit Caroline Lamarre, qui avoue être au bout du rouleau.
Denis Lejeune a écopé d’un sursis de sentence et de 24 mois de probation en janvier 2016 pour ses gestes.
À l’époque, la loi permettait à un maire déclaré coupable d’agression sexuelle de continuer à siéger, à condition que sa sentence ne dépasse pas 30 jours d’emprisonnement. Il était inconcevable pour Caroline Lamarre de retourner travailler pour son agresseur.
Elle a dénoncé publiquement la situation et son histoire est à l’origine d’une modification de la loi qui est en vigueur depuis juin 2016. Désormais, les élus reconnus coupables d’un acte criminel ne peuvent tout simplement plus demeurer en poste.
Or, Denis Lejeune a porté son verdict en appel. Tant que la décision ne sera pas rendue, il peut rester maire.
Plus d’un an et demi après le verdict, Caroline Lamarre a l’impression que M. Lejeune fait durer le dossier en cour afin de pouvoir siéger comme maire jusqu’à la fin de son mandat, en novembre prochain. En août dernier, l’avocat du maire, Me Christian Maltais s’est retiré du dossier, ce qui a ralenti les procédures. Denis Lejeune doit présenter son mémoire à la Cour d’appel aujourd’hui. Une date sera ensuite fixée pour que la Couronne fasse de même.
UN AUTRE MANDAT ?
En attendant, impossible de savoir si Denis Lejeune tentera de renouveler son mandat aux élections de 2017. Le maire se fait plutôt discret et il n’a pas donné suite aux demandes d’entrevues du Journal.
«Je suis dans un cauchemar», a décrit Mme Lamarre, qui a de la difficulté à supporter l’ambiance qui s’est instaurée dans le petit village de la Côte-nord. Elle n’ose plus sortir de sa maison, car elle se dit la proie de nombreux préjugés depuis qu’elle a dénoncé le maire.
«Le peu d’amis qui restent autour de moi sont courageux parce que c’est simple: si quelqu’un est avec Caroline Lamarre à Baie-trinité, il est fini aux yeux des autres», a-t-elle dit.
GRIEF
Le Syndicat canadien de la fonction publique s’est aussi impliqué dans le dossier. Un grief envers la municipalité sera entendu en arbitrage en juin. Il demande à ce que l’employeur accommode Mme Lamarre pour qu’elle puisse reprendre ses fonctions sans avoir affaire à Denis Lejeune.