La laïcité : un tabou

Oui, Charles Taylor aura fait échouer cette tentative de régler, dans le consensus et les concessions mutuelles, un problème qui dure depuis 10 ans au Québec. Sans compter que M. Bouchard ne partage pas le même avis. Pourquoi serait-ce M. Taylor seul, contre monsieur Bouchard et le consensus annoncé, qui déciderait de la solution?

On aura, à la place du règlement attendu, une solution d’autorité que M. Couillard s’empressera de saisir au vol. Ses ministres vont-ils tous le suivre sans états d’âme? Je serais bien curieuse de savoir quelle serait la réponse d’un référendum sur le sujet.

STIGMATISATION ET PEURS

M. Taylor nous dit qu’une interdiction de porter des symboles religieux pour les agents de coercition serait de la stigmatisation. Quoi? L’absence de symboles religieux stigmatiserait des gens? La marginalisation ne serait-elle pas plutôt dans le fait de se singulariser en affichant de tels signes? En fait, on propose de ne pas stigmatiser l’autostigmatisation.

Quand on lui suggère que les Québécois ont probablement peur de voir leur société évoluer dans un sens non souhaité, M. Taylor décrète que les peurs des Québécois ne sont pas fondées. Et la peur de certains religieux qui devraient pratiquer leur religion dans la discrétion? Cette peur-là, elle, elle serait fondée? Je dis «peur», mais on pourrait parler de l’intransigeance de certains, étant donné que beaucoup de gens de toutes les confessions veulent aussi la laïcité de l’état québécois. Devant cette donnée non négligeable, n’est-il pas plus juste de dire que les Québécois ont peur que les religieux les plus intégristes parlent et se manifestent à la place et au nom des plus modérés? Mais j’imagine que cette peur-là serait tout aussi non fondée pour qui détient la Vérité.

M. Couillard, qui annonce déjà son choix, diabolise, comme à son habitude, la laïcité en s’enorgueillissant de sa fidélité à ses principes, comme s’il s’attribuait le monopole de la vertu. Comme s’il n’y avait aucune autre option respectable que la sienne! Gisèle Filion