Esclaves de nos téléphones
Le Journal a consacré un dossier, en fin de semaine, aux ravages du texto au volant.
Des jeunes surtout, et des moins jeunes aussi, crèvent en voiture parce qu’ils n’ont pu s’empêcher d’écrire un message à quelqu’un, comme si la chose était si urgente qu’elle justifiait tous les risques et les sacrifices imaginables.
On a beau multiplier les campagnes contre le texto au volant, le grand nombre semble s’en moquer.
PATHOLOGIE
Au mieux, l’individu raisonnable attend d’arriver à la lumière pour consulter son téléphone. C’est tout ce dont il est capable. Après ça, c’est plus fort que lui.
Mais on le sait, la voiture n’est qu’un des lieux où l’écran exerce sa fascination et sa maléfique puissance hypnotique.
Il suffit de regarder dans la rue. Les gens marchent le nez rivé à l’écran.
Ou dans les restaurants. Combien de dîneurs en viennent à laisser leur conversation de côté un temps pour se jeter, avec un regard à la fois avide et maniaque, sur leur téléphone intelligent, dans l’espoir insensé d’y trouver quelque chose d’indéfinissable. Peut-être un message? Peut-être une notification Facebook?
Je suspecte certains amants d’interrompre ou d’abréger leurs ébats pour consulter leur téléphone intelligent.
Qui est encore capable, aujourd’hui, de ne pas se jeter sur son téléphone dès qu’une sonnerie annonce la réception d’un courriel?
ESCLAVAGE
Rarement aura-t-on vu s’installer aussi rapidement une telle forme d’esclavage volontaire. Nous sommes en état d’excitation permanente devant nos machines, en attendant la nouvelle qui bouleversera notre quotidien.
On demande à notre téléphone de donner une réponse à la question du sens de notre vie.
Certains disent que nous sommes devant un problème de santé publique. Peut-être. Mais nous sommes aussi devant un problème culturel et même politique.
C’est une manipulation massive des consciences qui est rendue possible par cette transformation des individus en robots bien programmés.