Le Journal de Quebec

Une tartufferi­e de Radio-canada ?

- Guy Fournier guy.fournier @quebecorme­dia.com

Sans doute agacé par quelques mauvais coucheurs aussi «gossants» que je peux l’être, sentant la pression des millions de dollars que lui a accordés le gouverneme­nt libéral, le réseau français de RadioCanad­a s’est lancé corps et âme dans la culture avec un grand «C». En mars dernier, annonçant un investisse­ment supplément­aire de 675 millions $ sur cinq ans, le ministre des Finances Bill Morneau avait déclaré: «Nous devons en faire plus pour appuyer nos artistes.»

Toutes ses têtes pensantes ne sachant où donner de la tête tant elles se morfondent à la tâche, Radio-canada a profité de cette manne inattendue pour ajouter deux têtes à son cheptel de direction. Le diffuseur, semblant avoir oublié par quel bout prendre la culture, a donc créé le poste de directeur de la Stratégie culturelle à la télévision et celui de directeur du secteur culturel.

Forte de ses 30 années d’expérience, Francine Allaire a été nommée directrice de la Stratégie culturelle de la télévision et Sophie Morasse est devenue première directrice du secteur Culture (avec un grand C, évidemment!).

LE GRAND COUP DE DIMANCHE

Les résultats de ce tandem culturel d’enfer ne se sont pas fait attendre. Dimanche soir, on a sonné la charge. À 22 h 50, à l’heure où les Québécois éteignent leur lampe de chevet pour dormir, Radio-canada a présenté Tartuffe, le chef-d’oeuvre de Molière. Attention, il ne s’agissait pas d’une mise en scène faite pour la télévision, mais de l’enregistre­ment du spectacle présenté au Théâtre du Nouveau-monde l’automne dernier.

La mise en scène de Denis Marleau n’offrait guère de surprises même si lui et sa femme Stéphanie Jasmin avaient eu l’idée, je ne sais trop pourquoi d’ailleurs, de rajeunir Tartuffe de trois siècles et de le transplant­er au Québec à la fin de la Révolution tranquille. La scène où Tartuffe (Emmanuel Schwartz) veut séduire Elmire (Anne-marie Cadieux) donne néanmoins à la pièce un sérieux coup de jeune. Le moment a probableme­nt ravi tous les mâles un brin voyeurs qui ont eu la patience de l’attendre jusque tard dans la nuit.

NE VOUS RÉJOUISSEZ PAS TROP

Vous dormiez? Qu’à cela ne tienne, l’émission sera à l’affiche D’ARTV à 19 h le 16 avril. Si vous n’avez pas le coeur à Molière pour avoir trop mangé le midi de Pâques ou passé l’après-midi en famille à la cabane à sucre, vous pourrez voir Tartuffe sur tou.tv au moment qui vous conviendra.

Que les nostalgiqu­es des Beaux dimanches ne se réjouissen­t pas trop vite, Radio-canada n’est pas encore redevenu le vaisseau amiral de notre armada culturelle. Je me demande même si cette diffusion plutôt confidenti­elle de la pièce de Molière n’est pas une incroyable tartufferi­e du diffuseur public.

Peut-être veut-il ainsi laisser croire qu’il délaissera graduellem­ent les émissions dont peuvent très bien s’acquitter les chaînes privées afin de privilégie­r des production­s de haut vol qu’il est seul capable d’offrir? Mais peut-être veut-il démontrer qu’il n’y a pas d’intérêt pour le théâtre de la part de son auditoire?

Si la culture avec un grand «C» reste confinée à des heures aussi tardives qu’incongrues et si Radio-canada se contente d’enregistre­r des spectacles conçus pour la scène plutôt que de commander des production­s faites expresséme­nt pour la télévision, le diffuseur public aura été bien inspiré de commencer son offensive culturelle avec Tartuffe!

TÉLÉPENSÉE DU JOUR

Qui nous prouve que c’est Eugenie Bouchard sur les photos de Sports Illustrate­d? Et si c’était Beatrice, sa soeur jumelle!

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada