Son frère est devenu ministre ACQUITTÉ AVANT L’ÉLECTION
Accusé de production de drogue en lien avec les Hells Angels, le frère du futur ministre libéral François-philippe Champagne a réussi à être blanchi par la justice.
Un homme d’affaires inculpé d’avoir exploité un laboratoire de méthamphétamine lié aux Hells Angels a réussi à «négocier» son acquittement avec la Couronne au moment où son frère, maintenant ministre fédéral, se préparait à se lancer en politique.
C’est ce que relate la juge Chantal Lamarche dans un récent jugement à l’encontre de Guillaume Champagne, le frère de François-philippe Champagne, ministre du Commerce international dans le gouvernement Trudeau depuis janvier dernier.
Le 26 novembre 2008, l’escouade régionale mixte de lutte contre le crime organisé a investi une résidence dont Guillaume Champagne était propriétaire, à Grand-mère, lors du projet Carapace, l’une des 70 enquêtes en preuve dans l’opération Sharqc.
Au sous-sol, la police a saisi 34 000 comprimés de méthamphétamine, une presse à pilules, 4000 g de haschisch et de cannabis, une arme prohibée – un pistolet de calibre 9 mm – et 50 000 $. L’homme de 32 ans n’habitait pas cette maison, mais en quatre mois d’enquête, les policiers l’avaient vu s’y rendre au moins six fois. Il a dû faire face à 11 chefs d’accusation.
DOSSIER « TRÈS DÉLICAT »
La stratégie de son avocat, Me Gilles Doré, a consisté à «ne rien brusquer, à laisser aller les choses et ne faire preuve d’aucune agressivité dans le dossier en espérant, le moment venu, obtenir la meilleure situation possible» pour son client, a écrit la juge Lamarche, de la Cour supérieure, en condamnant Guillaume Champagne à payer 20 000 $ d’honoraires additionnels à Me Doré, à la fin 2016.
Le dossier était «très délicat», a-t-elle noté. Sans antécédents judiciaires, Champagne occupait «un poste de vice-président» dans l’entreprise familiale Bionest, qui a «des activités internationales».
«De plus, en 2013, son frère étudiait sérieusement la possibilité de se présenter comme député. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’en 2013 M. Champagne a insisté auprès de Me Doré pour que son dossier soit résolu», relate la juge.
AUCUN COUPABLE
Le 3 décembre 2013, à Shawinigan, la poursuite a informé le tribunal qu’elle n’avait plus de preuves à offrir. «Me Doré a réussi à négocier un acquittement avec le procureur de la couronne [...] sans qu’il y ait eu d’enquête préliminaire ni de procès», précise la juge Lamarche, en évoquant «certains éléments de preuve contradictoires» dans l’enquête.
Six mois plus tard, François-philippe Champagne était officiellement candidat libéral dans la circonscription de Saint-maurice-champlain et il a été élu en octobre 2015.
Les motifs de cet acquittement négocié ne seront pas rendus publics par le Directeur des poursuites criminelles et pénales, a dit une de ses porte-parole au Journal. Il est permis de croire que la poursuite n’était pas convaincue de pouvoir établir la culpabilité de l’accusé et de prouver qu’il savait ce qui se tramait dans son sous-sol.
Guillaume Champagne était accusé d’avoir comploté avec Marcellin Morin, un membre des Hells de Trois-rivières, et Elliot Perry, un proche du gang de motards. Perry se trouvait régulièrement à la résidence de Champagne, d’après l’enquête. Or, Perry et Morin ont bénéficié d’un arrêt des procédures dans le fiasco judiciaire de l’opération Sharqc.
Ce laboratoire clandestin est donc resté impuni.