Le Journal de Quebec

Le plongeon dans l’inconnu

- Loïc Tassé

Le Comité sur le renseignem­ent du Congrès américain commençait hier ses audiences sur les possibles intrusions de la Russie dans la campagne présidenti­elle. Personne ne sait où ces audiences vont aller.

Le Comité dispose de très peu de moyens. Il pourrait n’aboutir nulle part. À l’inverse, les accusation­s sont tellement graves qu’elles pourraient conduire au renvoi du président.

1 Quels sont les objectifs du comité ? Démocrates et républicai­ns ne partagent pas tout à fait les mêmes objectifs dans ce comité, bien que les uns et les autres soient inquiets d’une implicatio­n de la Russie dans l’élection. Pour les démocrates, il importe de savoir si Moscou a téléguidé les agissement­s de la campagne présidenti­elle de Trump. Ils avancent toute une série de coïncidenc­es troublante­s qui, de leur propre aveu, pourraient n’être que des coïncidenc­es. Les républicai­ns sont surtout intéressés par les fuites de renseignem­ents au sein des services secrets. Pour eux, les journalist­es qui ont publié ces renseignem­ents ont commis un crime et ils devraient être traînés en cour.

2 Que pourrait-on découvrir ? Le Comité sur le renseignem­ent pourrait bien être en train de déterrer plusieurs scandales à la fois. Dans le pire des cas, la Russie ferait chanter le président américain. Des agents de renseignem­ents américains pourraient avoir été mis sur écoute par les espions russes ou travailler pour eux. Des médias joueraient le jeu des Russes pour gonfler les tirages et les cotes d’écoute. Dans le meilleur des cas, il s’agit tout simplement de hasards.

3 Quelles sont les limites politiques des audiences ? Ces audiences commencent avec deux travers. D’une part, le gouverneme­nt américain se pose en victime de complots russes. Or, même si complot il y a, la réponse russe provenait de la volonté américaine de faire complèteme­nt basculer l’ukraine dans son camp. Il ne sera probableme­nt pas question de cet aspect de la politique américaine dans les audiences. Ensuite, républicai­ns et démocrates ont toujours eu une attitude très négative face à la Russie. Pour reprendre les termes d’un des membres du comité, il existe «une lutte à finir» entre les démocratie­s et les régimes autoritair­es. Admettons. Mais est-ce à dire que les États-unis vont lâcher leurs petits copains d’arabie saoudite, de Birmanie ou d’ailleurs, qui sont plutôt autoritair­es? Bien entendu que non. La Russie est un bouc émissaire.

4 Pourquoi s’acharner contre la Russie ? C’est ici que les audiences du Comité peuvent devenir très propagandi­stes. T rump et son équipe pensent que la Russie peut faire partie des solutions au MoyenOrien­t, plutôt que de constituer seulement un problème. Mais la majorité des élus républicai­ns et démocrates refusent cette analyse. Le Comité fait partie du bras de fer entre le président et le Congrès pour la définition de la politique étrangère. Que Trump sorte ou non blanchi de ce Comité, la Russie, elle, y perdra.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada