Le Journal de Quebec

Des signaux d’alerte ignorés par les policiers

- Valérie Gonthier

Les policiers semblent avoir ignoré plusieurs signaux d’alerte lors d’une interventi­on auprès de la victime de violence conjugale tuée à Mont-st-hilaire mercredi.

«Ça n’a rien à voir avec ce qu’on enseigne. Ils n’ont pas suivi la formation des policiers», s’est indignée Lorraine Leblanc, ancienne enquêtrice à la police de Montréal, aujourd’hui enseignant­e en technique policière au Collège Ahuntsic.

Tôt mercredi matin, les policiers ont reçu un appel pour se rendre au dépanneur Beau-Soir, à Mont-saint-hilaire, parce que Daphné Huard-boudreault était apeurée par la présence de son ex-conjoint.

Sur place, les patrouille­urs de la Régie de police Richelieu–saint-Laurent ne semblent pas avoir appliqué des principes de base, notamment en ne prévenant pas une altercatio­n verbale.

«Séparer les gens impliqués, c’est la première chose qu’on montre aux étudiants. Et surtout, tu ne les laisses pas s’invectiver. Tu calmes le ton, tu vas chercher l’informatio­n. Ce n’est pas ça qui semble avoir été fait selon les premiers éléments reçus», a noté Mme Leblanc.

Selon elle, les policiers auraient aussi pu agir, afin d’éviter qu’anthony Pratte-lops puisse s’approcher de son ex-copine par la suite.

«Il y avait des choses à faire, c’est certain. Est-ce qu’ils auraient pu l’arrêter pour l’avoir intimidée dans sa voiture tôt le matin? Ou confier la jeune femme à des ressources», a-telle insisté.

DÉRAPAGE pas ÉVITÉ

Même son de cloche pour un criminolog­ue expert dans les recherches sur la violence conjugale, qui croit que les policiers auraient dû être en mesure de détecter «le dérapage» à venir.

«Le meilleur signal est qu’il y avait déjà eu une interventi­on policière dans le passé avec ce couple», a noté Frédéric Ouellet, chercheur à l’université de Montréal.

Selon lui, le fait qu’il s’agisse d’un jeune couple en rupture aurait dû également alerter les policiers.

«La littératur­e est claire: plus l’auteur de la violence est jeune, plus il y a de chance que ce soit grave. Et c’est connu que les périodes les plus à risque sont les moments de rupture. Il n’y avait rien pour négliger la situation, pourtant les policiers ont mal jugé», a-t-il ajouté.

L’ancien policier François Doré déplore pour sa part que la sécurité de la jeune femme n’ait pas été priorisée.

«Les policiers n’ont pas de boule de cristal, mais ils devaient à ce moment prendre connaissan­ce de la violence et aller plus loin dans l’évaluation du risque et de la menace. À première vue, quelqu’un a échappé la balle», a-t-il dit.

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LORRAINE LEBLANC Enseignant­e en technique policière

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