Le Journal de Quebec

De stérile à maman quatre fois

Julie Audet a déjoué les pronostics des médecins qui ne lui donnaient que quelques mois à vivre

- Elisa Cloutier

Julie Audet a été foudroyée par un cancer virulent à 15 ans; les médecins prédisaien­t qu’il ne lui restait que quelques mois à vivre. On lui a aussi dit qu’elle serait stérile. Vingt-cinq ans plus tard, elle est mère de quatre enfants et dit que les pronostics sont faits pour être défiés.

Au réveil, un matin de mars 1992, Julie a senti une «bosse» dans son cou, de la grosseur d’une cerise. «On est allés à l’urgence à l’hôpital de l’enfant-jésus de Québec et on m’a dit que c’était probableme­nt un kyste, que ça allait fondre tout seul, mais si ça changeait, il fallait que je revienne», raconte celle qui, à l’époque, était en quatrième secondaire dans une école de Beauport.

En à peine 48 heures, la masse avait plus que doublé, atteignant la taille d’un pamplemous­se. «Nous sommes retournés à l’hôpital, mais là, je ne suis jamais ressortie», se rappelle la femme, aujourd’hui âgée de 40 ans.

Puis, le diagnostic frappe: un rare cancer des muscles appelé rhabdomyos­arcome (sarcome des tissus mous). On lui retire la masse en urgence.

«Il y avait plein de médecins qui venaient m’examiner. On me virait de tous les côtés. J’étais un cas rare», indique-telle. En effet, le rhabdomyos­arcome, qui frappe rarement chez l’adulte, touche 3 % à 5 % des cas de cancers infantiles et est très rare chez les adolescent­s, selon la Société canadienne de cancer.

«À l’époque, personne de mon âge n’avait le cancer, ce n’était pas connu comme aujourd’hui», se rappelle la résidente de Beauport.

UNE DEUXIÈME BOSSE

Mais, le cancer n’avait pas dit son dernier mot. Alors que Julie recevait ses premiers traitement­s de chimiothér­apie et de radiothéra­pie à Québec, une deuxième «bosse» est apparue dans son cou, à quelques centimètre­s de la première. «Ils [les médecins] ont dit à mon père que je ne passerais pas Noël», affirme-t-elle.

Devant la virulence du cancer, les spécialist­es n’ont eu d’autres choix que d'envoyer Julie à l’hôpital Sainte-justine, où elle s'est fait opérer et traiter par des spécialist­es.

On lui a enlevé un muscle du cou, tous les nerfs sensitifs, la clavicule droite et la glande thyroïde. Elle a aussi reçu un «traitement-choc» pendant un an, hypothéqua­nt ainsi son cinquième secondaire.

Chaque fin de semaine, son père, son frère et sa soeur partaient de l’île d’orléans pour lui rendre visite. Mais, la semaine, la jeune femme de 16 ans, abattue et très malade à la suite des traitement­s, devait affronter seule sa dure réalité.

«Ce qui m’a sauvée, c’est Anne… la maison aux pignons verts. Quelqu’un m’a offert le premier tome, et j’ai été impression­née de voir à quel point elle voyait du beau et du bon dans tout. Je me disais que quand tout ça serait fini, c’est ce que je ferais», se souvient-elle.

Près de 20 ans plus tard, elle s’est rendue à l’île-du-prince-édouard pour faire un pèlerinage et visiter la fameuse maison qui l’avait «gardée en vie».

CADEAUX DE LA VIE

Le cancer avait laissé des traces. Une fois en rémission, Julie a dû réapprendr­e à utiliser son bras droit, une clavicule en moins, et à «sortir de chez elle avec un foulard sur la tête».

Mais, la nouvelle la plus difficile était à venir. «Je me rappelle que j’étais dans un cours de morale, je revenais de mon ren- dez-vous et on m’avait dit de ne pas me faire d’idées, d’en faire le deuil maintenant, que je n’aurais pas d’enfants, que les traitement­s m’avaient trop maganée», se rappelle-t-elle.

Quelques années plus tard, son gynécologu­e lui a répété la même chose. «Vous pouvez vous protéger si vous voulez, mais il n’y a pas de chance que vous tombiez enceinte», lui avait-il dit.

Mais, quelques mois plus tard, contre toute attente, Julie attendait sa première fille, Éloïck, le premier de ses quatre «bébés-surprises». «J’avais des grossesses à risques et j’étais suivie de près puisque je perdais beaucoup de poids, en raison de ma glande [thyroïde]. Quand j’étais à terme, je pesais moins qu’au début de ma grossesse», explique-t-elle.

LA MIRACULÉE

Aux yeux des médecins de l’hôpital Saint-francois-d’assise, où elle était suivie de près lors de ses grossesses, elle est rapidement devenue «la miraculée».

«On m’a dit que j’allais mourir dans trois ou quatre mois, je suis encore là, on m’a dit que je serais stérile, j’ai quatre enfants, en santé. J’ai défié les statistiqu­es. Emmenezen des problèmes, je suis capable d’en prendre!» s’exclame-t-elle.

 ??  ?? La femme, la mère, la survivante du cancer Julie Audet, accompagné­e de ses quatre «bébés-surprises». De gauche à droite, Gabrielle, 14 ans, Eloïck, 16 ans, Rose, 13 ans, et la dernière issue d’une autre union, Delphine, 7 ans.
La femme, la mère, la survivante du cancer Julie Audet, accompagné­e de ses quatre «bébés-surprises». De gauche à droite, Gabrielle, 14 ans, Eloïck, 16 ans, Rose, 13 ans, et la dernière issue d’une autre union, Delphine, 7 ans.

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