DES MILLIERS De CONTRAVENTIONS POURRAIENT ÊTRE ANNULÉES
Arrêt Jordan
Des milliers de contraventions contestées par des automobilistes devant les tribunaux risquent d’être annulées en raison de la lenteur de l’appareil judiciaire.
Quatre arrêts des procédures décrétés par un juge en Abitibi en faveur d’autant de requérants, le 7 mars dernier, donneront des arguments à tous les récipiendaires d’un constat d’infraction qui n’ont pas réussi à se faire entendre par le tribunal dans un délai de 18 mois.
Le juge Jacques Barbès en a libéré quatre en une seule journée parce qu’ils ont dû attendre de 26 à 35 mois entre le jour où un policier leur a remis un ticket pour excès de vitesse et celui de leur procès.
2700 PROCÈS EN RETARD ?
Estimant ces délais «nettement déraisonnables», le juge de la Cour du Québec a aussi laissé entendre que cette situation serait particulièrement problématique au palais de justice d’amos.
«Il y aurait actuellement environ 2700 dossiers à fixer pour procès et ça pourrait prendre jusqu’à deux ans pour rattraper le retard», a-t-il écrit, malgré des «mesures correctives» adoptées après que la Cour suprême a rendu le fameux arrêt Jordan, en juillet 2016.
Le plus haut tribunal du pays a alors réduit à 18 mois le délai à l’intérieur duquel une personne doit être jugée devant une cour provinciale et à 30 mois en Cour supérieure, à moins de «circonstances exceptionnelles».
LONGUE ATTENTE À QUÉBEC
Selon la preuve entendue par le juge Barbès, les constats d’infraction auxquels les requérants ont plaidé non coupables ont d’abord été traités à Québec, par le Bureau des infractions et amendes, dans des délais variant «entre cinq et onze mois».
Cette agence gouvernementale, qui comptait 153 employés réguliers en 2016, pourra d’ailleurs en embaucher 47 de plus, a annoncé hier la ministre de la Justice.
Puis, on a compté des délais de traitements additionnels de 10 mois au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) et d’un an au greffe pénal du palais de justice d’amos.
Selon le juge, ces contraventions sont pourtant «des affaires simples qui de- vraient être traitées rapidement» et les défendeurs ont le droit «d’obtenir justice rapidement».
281 AU COMPTEUR
Le DPCP n’a pas commenté ces cas, hier, puisqu’ils sont toujours susceptibles d’être portés en appel.
Depuis l’arrêt Jordan, le DPCP a précisé au Journal avoir reçu 281 requêtes en arrêt des procédures pour délais déraisonnables dans des dossiers pénaux comme des contraventions. C’est deux fois moins que les 547 présentées par des accusés en matière criminelle.
Mais cela ne représente qu’une partie des dossiers qui excéderaient le délai judiciaire de 18 mois.
«Je vois maintenant plusieurs de nos avocats qui plaident cet arrêt. Mais la situation change énormément d’une région à l’autre», a réagi le président de SOS Ticket, Alfredo Munoz.
En fin de compte, l’état et les villes, qui perçoivent ces amendes, écoperont de ces délais.
«C’est un dossier que nous allons surveiller. Il faudra voir quels seront les impacts pour nos membres», a mentionné Philippe Lemieux, porte-parole de l’union des municipalités du Québec, qui représente plus de 300 villes de la province.