Le Journal de Quebec

Le charme discret de Benoît Girard

- Guy Fournier guy.fournier @quebecorme­dia.com

Benoît Girard est mort discrèteme­nt. Comme il avait vécu. Rester discret lorsqu’on a une carrière comme la sienne, c’est un exploit dans le monde bling-bling du spectacle.

Une centaine de rôles dans une soixantain­e de films, de séries et d’émissions de télévision, une vingtaine d’adaptation­s et de rôles au théâtre en 60 ans de carrière, c’est une feuille de route plus que remarquabl­e. À la discrétion de Benoît, il faut ajouter le charme et la délicatess­e.

J’ai connu Benoît à mon arrivée à Montréal, en 1957. Il était déjà presque une vedette, jouant Denis Favreau et Patrice dans les téléromans Beau temps, mauvais temps et Le survenant, en plus d’un rôle dans Radisson, une série pour les jeunes. J’étais loin de me douter que son charme discret allait me jouer un mauvais tour.

Vous souvenez-vous de la Nichouette, la préférée du capitaine Aubert dans Cap aux sorciers, un des premiers téléromans de Radio-canada? C’était le surnom affectueux qu’avait donné le capitaine Aubert (Gilles Pelletier) à sa petite-fille Anne Vigneau. Anne, c’était Monique Joly. La jeune vingtaine, des lèvres charnues, des dents d’ivoire, des yeux malicieux et un rire sonore irrésistib­le. Une beauté craquante.

COUP DE FOUDRE GARANTI

Casser la croûte avec elle, c’était le coup de foudre garanti. Ce coup de foudre, il m’a frappé au Café des artistes, à l’angle de Bishop et Dorchester, la cantine qu’on fréquentai­t tous au moment où la télévision se faisait uniquement en direct. Nous vivions ensemble presque jour et nuit comme une grosse troupe de saltimbanq­ues. J’écrivais alors Les tuniques rouges, une série dramatique pour la radio internatio­nale de Radio-canada. Ce fut le coup de foudre pour moi, mais pas pour Monique. Je l’ai fréquentée quelques mois plein d’espoir. Coups de téléphone quotidiens, soirées au cinéma, soupers au restaurant ou chez elle quand elle n’avait pas de gardienne pour son bébé. Hélas! nous n’avons jamais échangé plus que des baisers…

C’est que Monique avait un amour. Secret, si je puis dire, car l’élu de son coeur n’en savait rien et elle n’osait pas le lui avouer. Je l’ai même appris avant lui, Monique finissant par confesser qu’elle n’avait d’yeux que pour Benoît Girard. Que pouvais-je faire contre un rival pareil? Il était beau comme Gérard Philippe, il avait la voix enveloppan­te et un regard tellement romantique.

UNE GRANDE HISTOIRE D’AMOUR

Mon ami Marcel Dubé, à qui j’avais confié mon échec, se chargea d’ouvrir les yeux de Benoît. C’est ainsi qu’a commencé pour lui une histoire d’amour à laquelle n’a même pas mis fin la mort de Monique, il y aura deux ans en juillet.

Durant toutes ces années, Benoît fut pour elle un compagnon fidèle, attentionn­é et débordant de délicatess­e. Il fut en plus un père affectueux et un guide irremplaça­ble pour le jeune enfant de Monique à qui il a donné son nom.

Durant les cinq saisons de ma série Peau de banane à TVA, Benoît a interprété avec intelligen­ce l’inénarrabl­e Narcisse Labbé, l’adjoint de Madame Saint-laurent (Louise Deschâtele­ts), en plus de jouer dans Ti-jean Caribou et Jamais deux sans toi, que j’ai écrits pour Radio-canada.

Malgré les airs coquins et légers qu’elle prenait souvent, Monique Joly avait fait preuve d’un jugement sans failles en me larguant pour Benoît Girard! Se pourrait-il qu’ils soient réunis de nouveau? Je le souhaite.

TÉLÉPENSÉE DU JOUR

Le maire Denis Coderre précise que la réglementa­tion sur les pitbulls ne s’applique pas aux cols bleus.

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