1997 La mort d’un géant
La veille de Noël 1997, le Québec apprenait la mort de Pierre Péladeau, 72 ans, décédé des suites d’une attaque cardiaque qu’il avait subie dans son bureau au début du mois de décembre.
Parti de rien, Monsieur « P » comme on l’appelait familièrement entre employés, avait emprunté 1500 $ à sa mère en 1950 pour se lancer en affaires, en achetant le Journal de Rosemont. Cet hebdomadaire devint le point de départ d’une grande aventure qui allait faire de Pierre Péladeau le premier milliardaire né au Québec. En moins de cinquante ans, cet homme a construit un empire dans le monde de la presse et de l’imprimerie. Au moment de sa mort, Québecor était au dixième rang des plus grandes entreprises au Québec.
FIER D’ÊTRE QUÉBÉCOIS
Fervent nationaliste, Pierre Péladeau ne cachait pas qu’il fondait de grands espoirs dans la capacité des Québécois à maîtriser leur destin. Au cours du référendum de 1995, alors que le camp fédéraliste brandissait les dangers que représentait la souveraineté, M. Péladeau intervint très peu dans le débat. Mais chaque fois qu’il était appelé à se prononcer sur la question économique, il déclarait : « N’ayez pas peur ». Quelques jours après sa mort, Pierre Bourgault écrivait dans Le Journal un billet qui résume assez bien tout ce qui a été dit ou écrit sur ce grand bâtisseur au fil des ans : « Ce n’était pas un homme riche comme les autres. Les riches ont l’habitude de rester discrets, pas lui. Il est resté délinquant, ce qui lui a permis d’utiliser son argent à des fins plus nobles que ce que nous connaissons habituellement ».
UN GRAND PHILANTHROPE
Ses propos pittoresques, sa facilité à
communiquer, son charisme et sa profonde humanité sont les principales qualités que les gens qui l’ont côtoyé ont retenues de lui. Il avait l’habitude de dire : « Quand on a beaucoup, il faut donner beaucoup ». Une attitude qu’il a conservée tout au long de sa vie. Jacques Parizeau avait de l’admiration pour lui : « Ce qui m’a le plus surpris dans sa façon de faire, c’est de voir un chef d’entreprise de cette envergure diriger son action de mécénat dans son milieu immédiat et là où il y avait des besoins. Il a choisi d’aider l’université du Québec plutôt que l’université de Montréal, l’orchestre métropolitain plutôt que l’orchestre symphonique de Montréal. Il ne cherchait pas la grande reconnaissance ou la grande publicité. Il voulait juste faire sa part. » En plus des arts, Pierre Péladeau a montré sa grande générosité lors du déluge du Saguenay, en versant un million de dollars pour aider les sinistrés. Aux prises avec un problème d’alcoolisme qu’il n’a jamais caché, il a financé un centre de traitement de cette maladie pendant des années. En perdant Pierre Péladeau, « … le Québec a perdu un homme d’argent, mais aussi un homme de bien… », concluait Pierre Bourgault dans son hommage à Monsieur « P ».