Le Journal de Quebec

Bombardier : revoir notre argent

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Le géant québécois Bombardier s’est placé en fâcheuse position dans l’opinion publique en grimpant le salaire de ses dirigeants. Du même coup, il a plongé le gouverneme­nt Couillard dans un sérieux pétrin politique. Pas génial comme remercieme­nt à celui qui a tant aidé l’entreprise à un moment critique.

L’une des choses qui m’étonnent et qui m’inquiètent, c’est qu’à aucun moment quelqu’un n’ait abordé la notion de retour de notre argent, tout au long de cette saga qui dure depuis près d’une semaine. Tout a été dit pour tenter de calmer la grogne populaire, mais personne n’a pensé rassurer les contribuab­les en évoquant les éventuels chèques de remboursem­ent et les rendements.

LA SEULE ISSUE À LA CRISE

Pourtant, il me semble que c’est le symbole ultime d’un accord gagnant-gagnant qui donnerait aux hausses de rémunérati­on un goût moins amer pour les citoyens du Québec. L’entreprise a déjà rendu les bonificati­ons conditionn­elles à l’atteinte de certains niveaux de performanc­e. Pourquoi ne pas y inclure l’idée qu’avec de telles performanc­es, les Québécois vont commencer à revoir l’argent investi en plus de profiter des retombées économique­s positives d’un géant aéronautiq­ue en santé?

Ce serait la sortie de crise honorable. Cela fournirait un discours plus convaincan­t à Bombardier et surtout une position moins gênante au gouverneme­nt libéral.

Petit rappel: par le biais d’investisse­ment Québec, le gouverneme­nt a pris une participat­ion de 1,3 milliard dans une nouvelle société en commandite pour commercial­iser la C Series en partenaria­t avec Bombardier. L’état devenait détenteur de 49,5 % des actions.

Fait important, quand Investisse­ment Québec prend une telle participat­ion dans une entreprise, le but n’est pas de la nationalis­er. Le but est plutôt d’aider l’entreprise à créer des emplois, à en préserver ou à innover. Lorsque la situation financière le permet, la compagnie privée rachète ensuite ses actions, repayant Investisse­ment Québec avec un rendement.

Dans le cas de Bombardier, le peu d’informatio­n disponible sur l’entente nous permet de savoir que l’entreprise pourrait racheter les parts d’investisse­ment Québec par tranches de 25 % à partir de 2019. Évidemment, cela requiert que les finances de l’entreprise soient suffisamme­nt redressées pour dégager les liquidités nécessaire­s à un tel programme de rachat.

Se pourrait-il que si personne n’a effleuré cette question du retour de notre investisse­ment, c’est qu’il reste pas mal d’incertitud­e dans le portrait? Serait-ce que personne n’ose se risquer à aborder les scénarios par lesquels Investisse­ment Québec va récupérer notre argent?

GOUVERNEME­NT EN MAUVAISE POSTURE

Même le gouverneme­nt Couillard n’ose pas avancer sur ce terrain. Dans l’intervalle, le gouverneme­nt paye le prix politique. Il a l’air du défenseur des multimilli­onnaires, impuissant et soumis. Une très mauvaise image.

Je connais déjà la réponse à mes interrogat­ions sur le retour de notre argent investi dans Bombardier. C’est trop vite, il faut continuer à travailler à la commercial­isation des avions C Series avant d’envisager un rachat. En somme, en ce début 2017, il est encore trop tôt pour parler de cela.

Alors il était peut-être aussi trop tôt pour offrir des bonificati­ons salariales aussi généreuses…

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