Le Journal de Quebec

Éthique et culture religieuse : éduquer ou endoctrine­r ?

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com

Le ministre de l’éducation, Sébastien Proulx, a donné le feu vert à une réévaluati­on du controvers­é cours d’éthique et culture religieuse, obligatoir­e au primaire et au secondaire.

Cette réévaluati­on sera «accompagné­e» par le même fonctionna­ire qui a piloté l’introducti­on du cours en 2008: feriez-vous évaluer votre maison par celui qui l’a construite?

Tout ce cours repose sur un détourneme­nt de sens.

Certes, vivre dans une société de plus en plus multiethni­que impose de mieux connaître les diverses religions.

Qui diable pourrait s’opposer aussi au «respect», à la «tolérance», à «l’ouverture»?

Il aurait fallu recommence­r à zéro. Ça n’arrivera pas et c’est très regrettabl­e.

ENDOCTRINE­MENT

Derrière cet objectif raisonnabl­e et ce discours vertueux, c’est pourtant autre chose qui est transmis aux enfants.

Les manuels utilisés pour donner ce cours ont déjà fait l’objet de plusieurs études.

Au nom du respect et de la tolérance, on se refuse à examiner les religions sous l’angle de la logique, de la science, de la raison.

Les récits mythiques sont présentés sans recul objectif, sans discussion.

Des exercices valant des points demandent aux enfants du primaire de choisir leur rite préféré ou d’organiser une petite cérémonie religieuse.

Les explicatio­ns scientifiq­ues sur l’origine du monde et de la vie ne sont jamais mises en parallèle avec les discours religieux.

Vous ne trouverez pas le moindre examen critique du mal que l’on peut faire au nom de la religion: pas un mot sur le terrorisme, les crimes d’honneur ou la misogynie.

Comprenez-moi bien: il ne s’agit pas d’enseigner l’hostilité à la religion, ce qui ne serait que le remplaceme­nt d’un dogmatisme par un autre.

Il faudrait présenter les religions comme un objet sociologiq­ue que l’on doit examiner avec un souci d’objectivit­é, comme on le ferait pour l’étude d’une idéologie ou d’une institutio­n.

Le cours propose plutôt une vision de la foi religieuse qui laisse lourdement entendre qu’il serait irrespectu­eux et intolérant de l’examiner froidement, ce qui inclurait logiquemen­t ses aspects problémati­ques autant que ses aspects positifs.

Conséquemm­ent, le niqab et la burqa sont présentés comme des choix vestimenta­ires parmi d’autres.

Les photos montrent toujours des fidèles intégriste­s, puisqu’ils sont fervents au point de vouloir absolument porter des signes visibles.

Vous ne trouverez pratiqueme­nt rien dans ces livres sur l’athéisme, la laïcité ou les croyants non pratiquant­s, qui sont pourtant l’immense majorité.

Le croyant venu d’ailleurs n’est pas dépeint comme quelqu’un qui veut devenir comme nous, mais comme quelqu’un qui veut très légitimeme­nt reproduire la façon de vivre de sa société d’origine.

POGNÉS AVEC

Au fond, l’enfant est exposé, pendant des années, à une vision du phénomène religieux qui lui inculque qu’il est vertueux de croire sans se questionne­r et irrespectu­eux de questionne­r cela.

Au nom du fameux «vivre-ensemble», on fait la promotion enthousias­te de toutes les différence­s qui permettron­t à chacun de rester replié dans sa communauté d’origine.

Il ne faut pas simplement modifier ce cours. Il aurait fallu recommence­r à zéro. Ça n’arrivera pas et c’est très regrettabl­e.

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