Le Journal de Quebec

L’illusionni­ste de la Maison-blanche

Pendant que le président Trump mène un spectacle chaotique qui mobilise l’attention des médias, certains éléments de son programme sont mis en place en catimini.

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C’est le truc des prestidigi­tateurs: pendant qu’une main attire l’attention, l’autre fait le vrai travail. Les spectateur­s peuvent être émerveillé­s, mais en fait, ils sont floués.

Sur plusieurs plans, donc, le programme de Donald Trump avance en douce, et pas toujours pour le mieux.

AFFAIBLIR L’ÉTAT

En politique intérieure, le spectacle parfois distrayant qui entoure Trump dissimule une entreprise assez efficace de démantèlem­ent de l’état fédéral au bénéfice de la grande entreprise.

C’est surtout évident en environnem­ent, où Trump est en train de donner carte blanche aux pollueurs industriel­s. En février, après avoir signé un tel décret sous l’oeil bienveilla­nt du président de Dow Chemicals, Trump s’est d’ailleurs empressé de lui donner le stylo.

Plus récemment, après un vote expéditif au Congrès, Trump signait une loi qui donne aux fournisseu­rs internet le droit de faire essentiell­ement ce qu’ils veulent des données privées de leurs utilisateu­rs.

Sans oublier la déréglemen­tation du secteur financier au profit des amis milliardai­res de Trump, ou les «deals» qui feront pleuvoir des bénéfices sur les entreprise­s de sa famille.

SATISFAIRE LES IDÉOLOGUES

Dans les domaines plus symbolique­s chers aux idéologues républicai­ns et aux groupes d’intérêts conservate­urs, Trump sait qu’il ne pourra pas faire beaucoup de gains législatif­s dans un contexte où les démocrates peuvent bloquer la plupart des propositio­ns avec seulement 40 votes, grâce au filibuster.

Pourtant, Trump a déjà gagné de précieux points à droite grâce à des règles procédural­es qui mettent certains votes à l’abri du filibuster.

Par exemple, le lobby des armes à feu a réussi à faire éliminer l’une des rares restrictio­ns que Barack Obama avait pu instaurer, empêchant la vente d’armes à des personnes atteintes de troubles mentaux.

La semaine dernière, le Sénat votait de justesse une loi qui coupe les vivres au réseau Planned Parenthood, qui offre des services (non subvention­nés) d’avortement. Trump n’a pas de conviction ferme sur l’avortement, mais il doit satisfaire minimaleme­nt les groupes pro-vie qui l’appuient.

Sur plusieurs plans, le programme de Donald Trump avance en douce, et pas toujours pour le mieux.

C’EST LA FAUTE À OBAMA

En politique extérieure, le discours de désengagem­ent de Trump lui permet de dévier l’attention d’une politique qui entraînera une hausse spectacula­ire des dépenses militaires et privilégie­ra la force à la diplomatie.

En Syrie, le nombre de troupes de combat augmente en douce et on peut s’attendre à une militarisa­tion plus prononcée de la politique américaine dans la région, pour laquelle Trump blâmera son prédécesse­ur.

La politique syrienne d’obama a eu des ratés, certes, mais Trump ne pourra pas esquiver ses propres responsabi­lités politiques indéfinime­nt.

UN MARCHÉ DE DUPES

Comme dans un jeu de gobelets, les tours de passe-passe de l’illusionni­ste de la Maison-blanche sont un marché de dupes.

L’opinion publique américaine ne se laisse pourtant pas complèteme­nt avoir, puisque Trump demeure impopulair­e, mais lorsqu’elle pourra se prononcer, les dommages seront faits.

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