Stratégie ? Quelle stratégie ?
La tension monte autour de la politique étrangère des ÉtatsUnis, mais pas aussi vite que la confusion. Donald Trump saitil où il va? Comprend-il la portée de ses paroles?
Il devient de moins en moins évident que l’administration Trump est guidée en politique extérieure par une vision et une stratégie cohérentes. Ses positions face au conflit syrien et à la Russie en fournissent des preuves quotidiennement. Il n’y a pas que la vision stratégique de l’équipe Trump qui pose problème. On peut aussi remettre sérieusement en question ses stratégies de communication. Que vaut la parole des États-unis de Donald Trump?
L’ANTI-OBAMA
Les frappes américaines en Syrie ont marqué bruyamment l’entrée de Donald Trump dans le grand jeu des relations internationales. Il souhaitait d’abord souligner le contraste entre son approche et celle de son prédécesseur.
On avait reproché à Barack Obama son inaction à la suite d’une attaque au gaz de Bachar al-assad. Trump, lui, a riposté immédiatement. Au diable les promesses de non-engagement.
Le contraste est tout aussi grand entre la prudence et la circonspection dont faisait preuve Obama et le cheminement instable de Trump, qui ne plaît à personne.
OÙ VA-T-ON ?
En Syrie, au cours des deux dernières semaines, l’administration Trump a successivement pris plusieurs positions contradictoires.
Initialement, on tolérait le régime Assad, mais l’attaque chimique qu’on lui a attribuée a amené Trump à souhaiter ouvertement son renversement. Après la riposte américaine, son administration a soutenu que le seul but était de sanctionner l’usage d’armes chimiques, mais d’autres conditions ont été ajoutées qui justifieraient de nouvelles frappes.
LES RUSSES IRRITÉS
Alors que les preuves d’une intervention russe dans la campagne de 2016 et d’une possible collusion avec des membres de l’entourage de Trump s’accumulent, Vladimir Poutine doit commencer à se demander s’il a misé sur le bon poulain.
Même si Donald Trump a maintes fois répété qu’il souhaite des relations cordiales avec la Russie, les révélations liées à la filière russe l’incitent probablement à prendre ses distances. Il est aussi possible que Vladimir Poutine joue le jeu en attendant un contexte plus propice au rapprochement promis.
Pour le moment, les Russes ne cachent pas leur irritation devant la direction imprévisible de Trump. Par conséquent, l’option d’une coalition russo-américaine contre Daech, longtemps souhaitée par Trump, semble aujourd’hui définitivement exclue.
QUE VAUT LA PAROLE DONNÉE ?
Quand on compare les paroles de Trump aujourd’hui avec celles qu’il tenait avant l’élection — ou même très récemment — ou avec les déclarations de membres de son équipe, il y a de quoi être dérouté par l’amoncellement de volte-face et de contradictions.
En laissant Assad traverser sa «ligne rouge», Barack Obama avait entaché sa crédibilité et affaibli sa position dans un conflit difficile.
Donald Trump a cru bien faire en ne répétant pas cette erreur, mais malgré son geste d’éclat, il parviendra difficilement à établir sa propre crédibilité si on ne peut pas se fier à sa parole d’un jour à l’autre.