Un ex-analphabète veut donner 100 000 bouquins
Un libraire qui a appris à lire à l’âge de 21 ans possède maintenant 100 000 livres qu’il veut donner dans les écoles, les organismes communautaires et les prisons.
Frédéric Fortin exploite des librairies de livres usagés à Beloeil et à Saint-hyacinthe, en Montérégie. Il s’est rapidement retrouvé encombré par des milliers de boîtes de livres. «Il y en avait partout, dans ma cuisine, mon sous-sol, mon cabanon. Ma blonde capotait», a expliqué l’homme de 37 ans.
Il ne voulait pas jeter de livres, car il s’agit d’un objet précieux pour lui. Il a donc dû louer un conteneur et un local pour les entreposer.
«Il faut que ça bouge, des milliers de trésors dorment dans des boîtes et sur les tablettes», a dit l’homme qui paie plus de 1000 $ par mois de location et entretien pour entreposer tous ses livres.
Ses 100 000 livres représentent environ la moitié de tous les livres disponibles dans les deux bibliothèques publiques de Saint-hyacinthe.
DEVENU LIBRAIRE
M. Fortin ne voit toujours pas comment il pourra vider son entrepôt et son conteneur. «J’appelle dans des écoles et des commissions scolaires, puis on me dit que la loi oblige l’achat de livres neufs. Je le sais bien. Mais moi, je veux les leur donner, pas les leur vendre», s’est exclamé le libraire qui demande seulement que les écoles viennent chercher les livres, qui sont déjà classés.
Celui qui possède une bibliothèque personnelle de plus de 2000 livres croit que chaque bouquin renferme un trésor. Il rêve que des organismes arrivent avec des autobus vides et repartent remplis de boîtes de livres choisis par les organisateurs de projet.
ENCOURAGEMENT
Après avoir lu plusieurs livres de psychologie et de croissance personnelle, M. Fortin accepte maintenant mieux son passé d’analphabète. «J’ai détesté l’école, et ce, dès la première année du primaire. Adolescent, j’ai pleuré, j’ai eu des idées noires, je me disais que les enseignants ne m’avaient pas fait échouer afin de mieux se débarrasser de moi l’année suivante», a-t-il dit.
Celui qui a redoublé sa première année et a lâché l’école en 2e secondaire a été déclaré analphabète à l’âge de 21 ans. Il n’est pas devenu libraire du jour au lendemain. À 25 ans, il a terminé son alphabétisation étapes 3 et 4, présecondaire, son secondaire, puis son attestation d’études collégiales en gestion de commerces.
«Ma paye, ce sont les encouragements reçus par les gens qui me remercient d’exister», a conclu Frédéric Fortin.