Le Journal de Quebec

Elle veut inciter les victimes à parler

Une jeune femme se sent libérée depuis que son beau-père agresseur a été reconnu coupable

- Valérie Gonthier l Vgonthierj­dm

Victime d’attoucheme­nts sexuels de la part de son beaupère pendant cinq ans, une jeune femme a décidé de le confronter en pleine salle d’audience avant qu’il prenne le chemin des cellules.

Exaspérée de se cacher, Samantha Tremblay a fait lever l’interdit de publicatio­n sur son identité. Elle a décidé de témoigner publiqueme­nt des abus qu’elle a subis dès l’âge de 10 ans, dans l’espoir d’inciter d’autres victimes à dénoncer à leur tour leur agresseur.

Lorsqu’il a eu l’occasion de s’adresser au tribunal vendredi dernier, Pierre Charest a tenu à s’excuser à son ancienne belle-fille. Et cette dernière n’a pas hésité à lui répliquer.

«Est-ce que tu te doutais à ce momentlà de ce que ça allait me faire?» a lancé la jeune femme de 28 ans. «Non! Et ça me dérange. Ça m’écoeure», a-t-il répondu.

GESTES RÉPÉTÉS

L’accusé de 50 ans a plaidé coupable en septembre dernier à des accusation­s d’attoucheme­nts sexuels et d’incitation à des contacts sexuels. Tout a débuté en 2000, lorsque la victime et son beau-père se sont amusés à prendre des photos en- semble. Mais chaque fois, les poses devenaient de plus en plus suggestive­s. Au fil des séances photo, la jeune fille s’est retrouvée nue. C’est par la suite qu’il en a profité pour la toucher. Il lui demandait aussi des faveurs sexuelles. En échange, il lui offrait des cadeaux et de l’argent. Il répétait que la famille se briserait si elle le dénonçait.

Plusieurs des abus ont eu lieu dans la chambre de la victime, alors que l’accusé allait la rejoindre la nuit.

«Durant plusieurs années, j’ai eu de la difficulté à dormir puisque j’avais peur que tu entres à nouveau dans ma chambre. Le bruit de la porte de votre chambre qui frotte sur le tapis me hantera toujours, c’était un signal d’alarme», a-t-elle témoigné, avec aplomb.

LIBÉRATEUR

Le juge Sylvain Lépine a condamné Charest à 28 mois de détention.

Malgré tout, Mme Tremblay avoue ne pas avoir ressenti de satisfacti­on lorsqu’elle a vu son agresseur prendre le chemin de la détention. Pour elle, c’est le fait de l’avoir dénoncé en 2011 qui a été libérateur.

Elle encourage ainsi les femmes aux prises avec un secret semblable à dénoncer.

À la fin de l’audience, le juge Lépine a souligné le courage de la victime.

«Vous l’avez bien compris, vous n’avez aucun reproche à vous faire. Je vous souhaite de réussir à réaliser votre rêve de fonder une famille», a-t-il dit à celle qui venait d’expliquer qu’elle craignait de ne jamais être capable de faire confiance à un homme. – Avec la collaborat­ion de

Christian Plouffe

«JE ME SENS PRISE DANS UN CORPS QUI A ÉTÉ SALI, SALI ET UTILISÉ PAR TES GRANDES MAINS QUI AURAIENT POURTANT DÛ ME PROTÉGER.» -Samantha Tremblay

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