Le Journal de Quebec

Trump, Le Pen et les autres

- Richard Latendress­e richard.latendress­e@quebecorme­dia.com

WASHINGTON | On a beau dire, l’élection présidenti­elle française nous fascine à cause de Marine Le Pen. Les autres candidats sont intéressan­ts pour différente­s raisons, mais si la présidente du Front national devait se démarquer avec un score élevé au premier tour du scrutin, puis remporter plus de 50 % des voix au second tour, nous nous retrouveri­ons tous la gueule décrochée. Ne dites pas le contraire!

Les sondages disent non, mais après les surprises qu’ont causées l’élection de Donald Trump à la présidence américaine et le choix des électeurs britanniqu­es de sortir de l’union européenne, un scepticism­e anxieux se justifie pleinement. Cela dit, quel que soit le résultat final, le populisme comme courant politique est sur son erre d’aller.

Chaque coin du monde, c’est clair, a ses différence­s, mais dans les pays industrial­isés, depuis quelques années, des thèmes similaires s’entrecrois­ent dans les débats politiques: remise en question du libre-échange, doute à l’égard de la mondialisa­tion, sentiment de trop-plein par rapport à l’immigratio­n.

Un peu partout, des leaders populistes se lèvent pour dénoncer ce qu’ils résument comme la mainmise des élites sur le pouvoir au détriment des citoyens moyens, oubliés par l’establishm­ent. Ils sèment le doute sur les institutio­ns mises en place pour servir la démocratie, mais dénoncées comme favorisant une minorité de privilégié­s.

TRUMP, D’ABORD

Donald Trump est de ceux qui ont eu le plus de succès avec ce discours, même si lui-même, fils de multimilli­onnaire et instruit dans une université de l’ivy League, a généreusem­ent profité de ce système prétendume­nt injuste. La contradict­ion, de toute évidence, n’affecte pas ses partisans.

En Europe, les leaders de ce type se sont aussi multipliés: de Nigel Farage, l’ancien chef de L’UKIP, le Parti pour l’indépendan­ce du Royaume-uni, à Viktor Orban, le premier ministre hongrois, en passant par Jaroslaw Kaczynski dont le parti — Droit et Justice — est actuelleme­nt au pouvoir en Pologne.

Et c’est sans oublier Geert Wilders aux Pays-bas, qui a subi une défaite aux élections législativ­es de mars dernier, mais qui, pendant la campagne électorale là-bas, a vu certaines de ses idées récupérées par le parti au pouvoir, le premier ministre Mark Rutte affirmant que la «majorité silencieus­e, aux Pays-bas, n’allait plus tolérer que des immigrants viennent abuser de nos libertés. Qu’ils s’adaptent ou qu’ils partent.» La peur des immigrés, c’est un thème qui porte, ces temps-ci.

TANT QUE ÇA M’ARRANGE

Il règne toutefois au coeur de ce populisme politique un cynisme que Donald Trump a plus positiveme­nt décrit comme de la «flexibilit­é»: une position un jour, une autre un autre jour. Ce qui l’amène maintenant, moins de 100 jours après être devenu président, à virer capot sur un sujet et un autre.

L’OTAN était dépassée, maintenant, c’est une «grande alliance». La Chine «violait l’économie américaine» et manipulait sa monnaie pour nuire aux États-unis; aujourd’hui, la Chine ne manipule plus rien du tout et constitue le partenaire dont Washington a besoin pour régler la crise nordcoréen­ne. Avant, c’était «America First!», pas question de contester des gouverneme­nts au Moyen-orient ou ailleurs; à présent, on évoque que la solution en Syrie passe possibleme­nt par le renverseme­nt du président Bachar al-assad.

Le populisme s’ajuste, mais va s’accrocher. Le mécontent de la classe moyenne, dans la foulée de la crise économique de 2008-2009, reste une force que les politicien­s de tout poil vont continuer d’exploiter. N’en doutez pas!

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