Le Journal de Quebec

Donald et Marine à Disney

- Communicat­rice, journalist­e et chroniqueu­se LISE RAVARY eblogueuse ∫ au Journal lise.ravary@quebecorme­dia.com @liseravary

Ce que je préfère à Disney World, c’est Main Street USA, cette partie du parc qui accueille le visiteur, une ode au passé, quand l’amérique était great.

Une réplique-fantasme de la vie dans une petite ville, inspirée de Marceline au Missouri où Walt Disney a grandi au tournant du 20e siècle. Tout le monde est heureux et a de belles dents. Tout est propret et pastel. Dans cet univers, on suppose que tout le monde est blanc et de classe moyenne.

Il ne pourrait y avoir de criminalit­é: on sent que les autorités ont les choses bien en main.

C’est le triomphe de la famille nucléaire. Les enfants mangent de la barbe à papa pendant que papa écoute un discours d’abraham Lincoln (les dates sont assez floues, merci) et que maman magasine à l’emporium où elle s’est rendue en tramway tiré par des chevaux. Tiens, voilà la fanfare qui s’amène. La nostalgie y est cultivée avec un souci maniaque: à Noël, Disney libère une fausse odeur de pain d’épice sur Main Street USA. Le passé, c’est vendeur. Disney a même créé une véritable ville appelée Celebratio­n, en banlieue du parc d’attraction­s où les gens vivent dans un environnem­ent hyper contrôlé – par exemple, toutes les clôtures doivent être blanches et en bois – qui recrée la perfection d’un passé mythique.

POLITIQUE ET NOSTALGIE

Les plans économique­s de Marine Le Pen et de Donald Trump me font penser aux efforts de Disney pour ramener un passé aussi parfait qu’impossible à faire renaître dans le monde réel.

Désolée, mais naguère-jadis, quand le commerce se résumait à fournir aux population­s locales les biens nécessaire­s à la vie quotidienn­e, quand le stéthoscop­e passait pour une technologi­e de pointe, quand les classes sociales étaient aussi définies qu’immuables, quand les gens ne voyageaien­t pas plus loin que le village d’à côté, est terminé. Fiou.

Les charmants téléphones à manivelle qui empêcherai­ent les adolescent­s d’envoyer des sextos ne reviendron­t pas plus que les hauts fourneaux du Midwest ou les houillères de Lorraine. Migrants et immigrants ne disparaîtr­ont pas d’un coup de baguette magique et personne ne remettra le dentifrice de marque Mondialisa­tion dans le tube.

ENCORE LES BOOMERS

Fermer les frontières, interdire l’immigratio­n, ramener le par-coeur à l’école sont des fantasmes de babyboomer­s qui n’ont pas encore compris que le monde de demain ne leur appartient pas.

À moins de se couper du monde, laissant l’asie, et bientôt l’afrique profiter de notre couardise, nous n’avons d’autre choix que d’accepter le réel, de travailler à l’échelle planétaire à le rendre meilleur et à en tirer parti, tout en protégeant l’humain de ses excès. S’ouvrir ne veut pas dire sacrifier ce qui est important, la culture, la langue, les institutio­ns. L’identité.

Quand Trump veut faire renaître l’industrie du charbon, il rêve d’hier.

Le monde auquel nous aspirons ne demande qu’à être construit. Mais pas à Disney World.

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Donald Trump a le même prénom qu’un célèbre personnage de Walt Disney , seule comparaiso­n.

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