Le Journal de Quebec

« Je n’ai pas été à la hauteur »

Gaétan Lelièvre reconnaît qu’il entretenai­t une amitié « imprudente » avec un consultant de chez Roche

- Annabelle blais

Gaétan Lelièvre a sous-estimé l’agressivit­é de la firme d’ingénierie Roche pour obtenir des contrats avec la Ville de Gaspé, même si le démarcheur principal venait jusque chez lui pour lui parler de contrats.

«Est-ce que j’ai été imprudent? Oui. Avec du recul, c’est clair que ça se passerait différemme­nt, c’est clair, net et précis», a déclaré le député de Gaspé, qui a été exclu du caucus du Parti québécois mardi après que Le Journal eut révélé qu’il avait sollicité et reçu des cadeaux de la firme Roche en 2009. Il était alors directeur général de la Ville de Gaspé.

«Sur le plan éthique et déontologi­que, je n’ai pas été à la hauteur», a-t-il dit au Journal.

M. Lelièvre a expliqué que Martin Lapointe, le consultant au développem­ent des affaires chez Roche, qui lui a prêté son condo, qui lui a fourni des billets de hockey et avec qui il a fait quelques soirées de gars, était devenu un ami de la famille.

«Il parlait à mes enfants comme un oncle leur parle, il faisait des activités avec eux, on l’a hébergé chez nous […] Aujourd’hui, je me rends compte peut-être que c’était de la mauvaise foi de sa part… On a peut-être été naïfs.»

PAS DU LOBBYISME ILLÉGAL

Lors de visites de M. Lapointe, M. Lelièvre reconnaît avoir parlé de contrats, comme ils pouvaient parler de leurs enfants et de la «vie de tous les jours». «On se cachait pas, tout le monde savait qu’on se côtoyait […] Les discussion­s [sur les contrats] se faisaient comme elles se font entre tout promoteur et entreprene­ur, ni plus ni moins.

«[Aujourd’hui], je serais beaucoup plus prudent», a-t-il dit avant d’ajouter qu’à ses yeux, ces rencontres ne représenta­ient pas une forme de lobbyisme illégal.

Selon le député, malgré cette relation de proximité, la firme Roche n’a jamais bénéficié d’un traitement de faveur pour l’obtention de contrats lorsqu’il était directeur général de la Ville, entre 2001 et 2010.

SOLLICITAT­IONS INTENSIVES

Le député a entretenu cette amitié dans un contexte où les firmes d’ingénierie jouaient du coude pour décrocher des contrats, à cette époque.

M. Lelièvre précise qu’au moins cinq ou six firmes d’ingénierie étaient alors présentes en Gaspésie vers 2008-2009. «C’était beaucoup mieux que ce qu’on avait vécu dans les années 2000 où on sentait qu’on était plus à la merci de deux firmes seulement», a-t-il affirmé.

Mais cette compétitio­n ne s’est-elle pas traduite par une pression accrue des firmes sur la Ville pour obtenir des contrats? «C’est sûr que les clients que sont les villes étaient mieux servis, on avait un meilleur choix, donc probableme­nt que la pression était sur les firmes d’ingénieurs qui voulaient se positionne­r et devaient être plus agressives dans leurs représenta­tions.

«On peut voir que oui, peut-être, il y avait des situations où il y a eu de la pression, mais c’était toujours discret et sournois», a-t-il poursuivi.

M. Lapointe n’a pas souhaité faire de commentair­es.

« Il parlait à mes enfants comme un oncle leur parle, Il faisait des activités avec eux, on l’a hébergé chez nous […] aujourd’hui, je me rends compte peut-être que c’était de la mauvaise foi de sa part… on a peut-être été naïfs. » — Gaétan Lelièvre, au sujet de Martin Lapointe, consultant chez Roche

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Gaétan Lelièvre (photo) a affirmé que Martin Lapointe, le consultant au développem­ent des affaires chez Roche, qui lui a prêté son condo, qui lui a fourni des billets de hockey et avec qui il a fait quelques soirées de gars, était devenu un ami de la...

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