Le Journal de Quebec

TROUVER LA BONNE IDÉE POUR INNOVER

Steve Wozniak, co-fondateur d’apple avec Steve Jobs, s’amène à C2 Montréal vendredi prochain

- Philippe Orfali l orfali

C’est le «deuxième Steve». Celui qui, avec Steve Jobs, a fondé Apple au fond d’un garage. Mais Steve Wozniak, c’est bien plus que ça. Geek assumé, inventeur devenu investisse­ur, «Woz» est un incontourn­able dans le monde de l’innovation. À quelques jours de son passage à la conférence C2 Montréal, Le Journal s’est entretenu avec lui.

Diriez-vous qu’il était plus facile d’innover à l’époque où vous avez conçu le premier ordinateur Apple, ou maintenant ? Les innovateur­s de cette époque-là, des jeunes, sont un peu sortis de nulle part. On faisait des choses auxquelles ne s’intéressai­ent pas du tout les grosses compagnies. Elles ne pensaient pas que c’était important ce qu’on faisait! Alors c’était facile pour nous, nous n’avions pas d’argent, pas de stress, pas de contrainte­s. On était là pour s’amuser, ce n’était pas une question de vie ou de mort. On était des jeunes du secondaire qui découvraie­nt des choses excitantes. Aussi simple que ça. Et qu’en est-il aujourd’hui? Je ne dirais pas que c’est plus difficile pour ceux qui veulent inventer une technologi­e ou une app. Mais les choses sont tellement plus définies, encadrées. Les technologi­es sont devenues tellement vitales et chaque invention ou innovation est susceptibl­e de valoir énormément. Mais ça signifie aussi qu’il y a beaucoup plus d’argent disponible! Des entreprise­s veulent offrir leur capital à ceux qui ont de bonnes idées. Aussi, je dirais qu’avant les ordinateur­s personnels, c’était impensable. Tu n’aurais pas eu de Mark Zuckerberg (inventeur de Facebook) si l’ordinateur n’avait pas été là.

Comment sait-on si on a une bonne idée entre ses mains ? (rires) J’aimerais bien le savoir! Quand j’ai vu le service de transport Uber, je n’y croyais pas. Je n’ai pas embarqué. Regardez comme j’ai eu tort! Chose certaine, il y a des secteurs qui sont particuliè­rement prometteur­s. La robotique en est un bon exemple. Ça va croître, croître et croître. Ça va changer complèteme­nt la façon dont oeuvrent les entreprise­s, surtout celles qui fabriquent ou qui assemblent.

Avec l’automatisa­tion et la robotisati­on, vous n’avez pas peur pour les pertes d’emplois ? C’est quelque chose dont on parle beaucoup quand on parle d’innovation et de nouvelles technologi­es. On pense qu’elles vont mener à des pertes d’emplois. Mais ça ne se concrétise jamais! C’est vrai que certains boulots disparaiss­ent. Mais de nouveaux emplois voient le jour en remplaceme­nt. On n’a qu’à voir les emplois qui sont hyper importants aujourd’hui, mais qui n’existaient pas il y a 40 ans. Tant qu’il y aura de l’innovation, il y aura de nouveaux emplois.

Quels conseils donnez-vous aux jeunes entreprene­urs et innovateur­s? Il faut faire une espèce d’introspect­ion, penser à la manière dont on fait son travail un peu différemme­nt et un peu mieux que les autres, et miser là-dessus. Les jeunes de 18 à 23 ans sont à une période de leur vie où ils sont en train de se définir. Ça veut dire que tu as encore la chance de t’asseoir et de te dire que tu veux faire quelque chose d’important dans la vie. Il faut aussi admettre que certaines idées sont bonnes, d’autres pas. Certaines technologi­es vont lever, d’autres pas. L’important, c’est de persévérer.

Quelles doivent être leurs priorités? Leurs idées! Oui, tu as besoin d’un boulot pour payer ton loyer et t’alimenter, mais de grâce, travaille sur tes propres projets. Ça n’a pas besoin d’être pour une grosse compagnie, ça peut être pour toi-même. Poursuis l’excellence, ne te satisfais pas de la première version d’un projet. Oui, ce sont de longues heures, parfois tu n’en verras pas le bout. Mais fonce.

Qu’est-ce qui est plus important: avoir la bonne idée ou plutôt la bonne façon de l’exécuter? Les idées, ça ne vaut pas grand-chose, à vrai dire. Une fois qu’on a l’idée, la bonne, il faut démarrer une entreprise, établir un modèle d’affaires. Il faut quelque chose qu’on peut voir, prendre dans ses mains. Ça aidera les gens à mieux comprendre l’idée. Vous verrez, vous aussi, votre potentiel. Et surtout, vous aurez votre destin entre vos mains plutôt qu’entre celles des autres. Ce sera votre idée et votre produit. Enfin, est-ce que les entreprise­s et le milieu de l’éducation peuvent faire quelque chose pour encourager l’innovation ? C’est une question importante. J’encourage souvent les chefs d’entreprise à permettre à leurs employés de se consacrer à des projets personnels, le soir, sur leur lieu de travail. Ça crée un environnem­ent où l’innovation et la création sont permises et encouragée­s, et ça ne peut qu’avoir des retombées positives sur la compagnie. À l’école, il faut que la créativité des jeunes puisse être stimulée, encouragée, poussée. On ne peut pas juste parler aux élèves toute la journée et leur faire passer des tests, il faut qu’ils puissent travailler sur des projets, des trucs manuels ou pas, même si ça sort un peu du cadre strictemen­t pédagogiqu­e. Je sais de quoi je parle, j’ai été éducateur pendant huit ans!

« ON NE PEUT PAS JUSTE PARLER AUX ÉLÈVES TOUTE LA JOURNÉE ET LEUR FAIRE PASSER DES TESTS. IL FAUT QU’ILS PUISSENT TRAVAILLER SUR DES PROJETS DE TYPE MANUEL OU PAS » – Steve Wozniak, co-fondateur D’APPLE

 ??  ?? 1. Steve Jobs (à droite) et Steve Wozniak (à gauche) ont conçu le tout premier ordinateur personnel Apple, qui a révolution­né la micro-informatiq­ue à la fin des années 1970 2. Le garage des parents de Steve Jobs, à Palo Alto en Californie, où ils ont...
1. Steve Jobs (à droite) et Steve Wozniak (à gauche) ont conçu le tout premier ordinateur personnel Apple, qui a révolution­né la micro-informatiq­ue à la fin des années 1970 2. Le garage des parents de Steve Jobs, à Palo Alto en Californie, où ils ont...
 ??  ?? 3
3
 ??  ?? 2
2
 ??  ?? 1
1
 ??  ??
 ??  ?? 4
4

Newspapers in French

Newspapers from Canada