Le Journal de Quebec

Quand la radio parle de la radio

- CLAUDE VILLENEUVE eblogueur ∫ des Spin Doctors claude.villeneuve@quebecorme­dia.com vclaude

À Québec depuis 15 ans, j’ai vite compris que la radio y occupe une place qui ne connaît pas d’équivalent ailleurs. Pourtant, il reste deux jours par année où je tombe des nues devant sa culture particuliè­re. C’est lors de la publicatio­n des sondages Numéris.

Comprenons-nous bien. Pour avoir été en politique, je sais à quel point ces prises de mesure sont importante­s dans ces secteurs où l’on vit et meurt à travers l’adhésion du public. Les animateurs de radio le rappellent souvent, c’est comme recevoir son bulletin.

Justement. J’entends à longueur d’année sur les ondes des intervenan­ts qui critiquent ces politicien­s obsédés par les enquêtes d’opinion. Et voilà que deux fois par année, ces hérauts si indépendan­ts d’esprit deviennent complèteme­nt fous quand les sondages qui les concernent sont publiés.

TOUS NUMÉRO 1 !

Pendant une journée, on ne parlera que de ça. Sur toutes les stations, un même message: nous sommes numéro 1!

Puis, sur une antenne, un animateur traite un concurrent de niaiseux. Il s’excusera le lendemain.

Un collègue dit ensuite que la victoire des uns n’en est pas une, puisqu’elle s’appuie sur une clientèle moins payante en publicité. Sur une autre fréquence, un polémiste souligne qu’en segmentant la population, tout le monde peut pré- tendre être premier.

Plus tard, un meneur de longue date faisant l’envie de ses collègues nargue le recul d’un rival et dit qu’une concurrent­e doit tout à un seul de ses collaborat­eurs. Puis, un nouveau venu du weekend lui rappelle qu’il avait gagé sa maison que son émission ne marcherait pas.

ET LE PUBLIC ?

La question que je me pose, c’est à savoir si tout ce beau monde trouve qu’il a l’air intelligen­t.

Surtout, je me demande si cette discussion intéresse le public.

À Québec, le sujet préféré de la radio, c’est parler de la radio. Sur ce média si désireux de décrier Montréal, on y joue à être un village comme dans aucun autre milieu de la ville.

Personnell­ement, je collabore chaque semaine à Radio-canada et je suis souvent invité à CHOI, BLVD, FM93, CKRL et CKIA. Il y a des gens que j’apprécie sur chaque antenne et j’étais authentiqu­ement content pour ceux qui ont eu de bons résultats.

UNE JOURNÉE À SE TAPOCHER

Le Bleuet que je reste ne peut toutefois s’empêcher de sourire en voyant cet étrange rituel où ça se tapoche sur la planète radio pour savoir qui est numéro 1.

À la fin, je me dis que personne ne doit vraiment être heureux de son score s’il ressent le besoin de s’en prendre au concurrent qui a l’outrecuida­nce de prétendre être satisfait lui aussi.

Ça me laisse songeur. Je vais y réfléchir en me rappelant que Le Journal a également eu des résultats de sondage historique­s ce printemps. Mais ça, vous ne l’aurez pas su à la radio.

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