Un délateur raconte sa vie rappelant le film Cartel
«La première fois que j’ai vu 100 kilos de cocaïne étalés sur une table, j’avais été très impressionné. On pense qu’on voit ça juste dans les films. Mais après, c’est devenu normal pour moi.»
Comparant sa vie au long métrage Cartel, dans lequel Johnny Depp incarnait un prolifique narcotrafiquant, un délateur a relaté comment il a participé à l’importation de «1000 à 1500 kilos» de cocaïne au Québec en 18 mois, pour une organisation criminelle bien rodée, hier, au palais de justice de Longueuil.
Ce Québécois de 33 ans, qu’il nous est interdit d’identifier, témoignait pour la Couronne au procès de Sébastien DolanSanchez, un résident des Laurentides accusé d’avoir transporté du pot vers les ÉtatsUnis et d’avoir ramené de la cocaïne au Québec pour le même réseau.
Les deux hommes avaient été arrêtés par la Sûreté du Québec dans l’opération Loquace, en novembre 2012.
Cette organisation qui alimentait les Hells Angels avait un moyen ingénieux pour traverser la frontière en douce.
FAUX RÉSERVOIRS DE DIESEL
Elle utilisait comme couverture légale une entreprise de transport des Laurentides dont les conducteurs allaient souvent chercher des roulottes neuves aux États-unis pour qu’elles soient vendues à des vacanciers québécois.
De faux réservoirs additionnels de die- sel d’une capacité de 484 litres avaient été installés dans l’espace de chargement d’une demi-douzaine de camionnettes Dodge Ram de la compagnie.
C’est dans ces grosses boîtes métalliques que la drogue était dissimulée.
«Les paquets étaient empilés dans des boîtes Home Depot ou des valises. Chaque kilo était emballé d’un mélange de mélasse, de goudron, de papier d’aluminium et de pellicule plastique pour camoufler l’odeur et éviter la détection aux douanes», selon le délateur. Durant l’année et demie où il a trempé dans le transport et la distribution de cette drogue, il a touché 400 000 $ en salaire.
«J’en ai pas déclaré beaucoup à l’impôt...» a-t-il admis.
MILLIONS $ EN cash
Le repenti a expliqué au jury avoir déjà transporté jusqu’à 3,2 millions $ cash d’un coup. Entre 15 et 20 millions $ générés par ce réseau lui sont passés entre les mains.
Il a eu la peur de sa vie à Chicago en prenant une livraison de «coke» de plusieurs «Mexicains armés». Ce fut sa dernière.
«Ils m’avaient vu texter au volant et ils m’ont demandé mon adresse et mon numéro de passeport», a-t-il relaté. Les trafiquants des dangereux cartels mexicains craignaient qu’il attire la police en causant un accident.
Le délateur, qui purge huit ans d’incarcération, témoignait derrière des paravents empêchant le public de voir son visage. Des policiers veillaient à sa sécurité dans la salle d’audience. Ce procès doit durer deux semaines.