Le Journal de Quebec

L’hypnose pour traiter les pédophiles

Des chercheurs belges ont commencé à utiliser cet outil auprès de leurs patients délinquant­s sexuels

- Claudia Berthiaume l Cberthiaum­ejdm

Déjà utilisée pour enrayer le tabagisme ou soigner la boulimie, l’hypnose peut maintenant servir à traiter les délinquant­s sexuels, d’après des chercheurs belges.

Être hypnotisé, ce n’est ni dormir, ni méditer. Il s’agit plutôt d’un «état modifié de conscience» dans lequel un patient est plongé volontaire­ment.

L’hypnothéra­peute peut ainsi entrer en contact direct avec l’inconscien­t du sujet grâce à la parole.

Démontrant un certain lâcher-prise, les patients sont plus sensibles aux suggestion­s du thérapeute qu’ils ne le seraient en temps normal. Et cela serait aussi vrai pour les délinquant­s sexuels.

«Tout le monde est capable d’entrer en hypnose, mais certains sont plus doués que d’autres. Ceux qui disent qu’ils en sont incapables ne veulent tout simplement pas le faire», soutient Pierre Collart, qui est docteur en sciences psychologi­ques à l’hôpital Vincent Van Gogh, en Belgique.

Celui qui travaille avec des délinquant­s sexuels depuis plus de 20 ans s’est récemment intéressé à l’apport de l’hypnose dans le traitement de ses patients.

Sa collègue Bettina Delmoitiez et lui ont présenté leurs recherches préliminai­res au Congrès internatio­nal francophon­e sur l’agression sexuelle (CIFAS), qui se tient à Montréal cette semaine.

VIRAGES À 180 DEGRÉS

D’après leurs études, l’hypnose pourrait permettre d’opérer des «virages à 180 degrés» dans les pensées de certains délinquant­s, comme cela a déjà été fait avec des personnes boulimique­s, notamment ( voir exemples).

Par exemple, il serait possible d’induire un sentiment de protection, de dégoût, voire de peur dans l’esprit d’un pédophile confronté à la vue d’un enfant.

Au lieu d’être attiré par l’enfant, le pédophile chercherai­t à s’en éloigner.

L’hypnothéra­peute pourrait également utiliser ses connaissan­ces pour développer des aspects positifs du patient, comme l’estime de soi.

«Il n’y a pas de truc magique qui guérit le monde, insiste toutefois le Dr Collart. Pour certains, ça fonctionne; pour d’autres, moins. L’hypnose n’est pas une thérapie, c’est un outil de la stratégie globale.»

Le traitement peut être utilisé en clinique pour tenter d’éviter un passage à l’acte du délinquant sexuel ou encore après le crime, pour diminuer le risque de récidive.

PAS COMME MESMER

Pour que le processus réussisse, il est essentiel que le patient soit motivé et ouvert d’esprit, note Pierre Collart. À ce titre, le chercheur estime que «l’hypnose-spectacle, comme le fait Messmer, peut faire beaucoup de dégâts».

Personne ne sera forcé de faire le chien ou de manger un plat de vers de terre dans le bureau d’un hypnothéra­peute, assure le Dr Collart.

«L’hypnose thérapeuti­que ou médicale, ce n’est pas du tout ce qu’on voit à la télé. On ne peut jamais imposer quelque chose à quelqu’un. Il n’y a aucun risque et aucune manipulati­on», stipule-t-il.

 ??  ?? Oeuvrant tous deux à l’hôpital Vincent Van Gogh, en Belgique, le Dr Pierre Collart et sa collègue Bettina Delmoitiez étaient de passage à Montréal pour présenter leurs recherches cette semaine.
Oeuvrant tous deux à l’hôpital Vincent Van Gogh, en Belgique, le Dr Pierre Collart et sa collègue Bettina Delmoitiez étaient de passage à Montréal pour présenter leurs recherches cette semaine.
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