« Un traitement injuste et gratuit »
Claire Williams se porte à la défense de son jeune pilote Lance Stroll
Claire Williams a réitéré en fin de semaine les propos qu’elle avait tenus lors d’une entrevue accordée au Journal le mois dernier, à l’occasion du Grand Prix d’espagne.
La patronne de l’écurie fondée par son père, Frank, ne cache pas son agacement à lire tout ce qui est reporté par les médias – et des amateurs aussi – à l’endroit de son pilote Lance Stroll depuis qu’il a effectué ses débuts en F1 en mars.
«C’est un traitement injuste et gratuit, a-t-elle indiqué. Comme toute recrue, il lui faut du temps. C’est un pilote très jeune qui a beaucoup à apprendre.»
À 18 ans, le Montréalais est le moins âgé du plateau.
Depuis ses premiers tours de roue dans la discipline-reine du sport automobile, Stroll n’a toujours aucun point au compteur.
Son meilleur résultat a été obtenu au Grand Prix de Russie, où il s’est classé au 11e rang sur un circuit qui lui était complètement inconnu.
PAS À CAUSE DE L’ARGENT
Le parcours de Stroll a été marqué par des sorties de piste qui ont fait jaser.
Des journalistes le critiquent sans retenue en écrivant encore aujourd’hui qu’il ne doit sa place en F1 qu’à la fortune de son père, Lawrence, et à rien d’autre.
«Son embauche n’a rien à avoir avec l’argent, a renchéri Williams. Si nous l’avons recruté, c’est d’abord pour son talent.»
Il a gagné partout où il est passé avant de rejoindre notre équipe.
«C’est une tradition chez nous de recruter des jeunes espoirs de la course, at-elle poursuivi. Nous le faisons depuis des années. Cette démarche a réussi dans le passé.
«Sans son palmarès, il ne serait pas là…»
ESSAIS PRIVÉS
L’écurie Williams est celle qui a donné une première chance à Jacques Villeneuve d’accéder à la F1 en 1996.
Le pilote québécois avait toutefois 24 ans quand il a signé son contrat, quelques mois après avoir remporté la prestigieuse épreuve des 500 Milles d’indianapolis.
Et celui qui devait être couronné champion du monde l’année suivante a pu profiter de milliers de kilomètres d’essais privés à bord de la nouvelle voiture avant de participer à sa première course de F1.
Aujourd’hui, à part quelques journées planifiées, les pilotes n’ont plus droit à ce privilège, même si Stroll a pu se faire la main l’an dernier avec un bolide datant de 2014.
«Le contexte n’était pas le même, a rétorqué Claire Williams. Il faut éviter toutes ces comparaisons douteuses avec Jacques ou tout autre pilote. Ça ne tient pas la route.»
Des comparaisons sont aussi inévitables avec Max Verstappen, qui est entré en F1 encore plus jeune (17 ans) que Stroll et dont le parcours a aussi été marqué par des coups d’éclat dans les catégories inférieures.
BOND PRODIGIEUX
Comme le Montréalais, le pilote des Pays-bas a fait le saut prodigieux de la F3 à la F1.
«Oui, cette transition est difficile, nous en sommes conscients et Lance l’est aussi. Il ne fallait pas s’attendre à ce qu’il gagne d’entrée de jeu. La F1 est beaucoup trop compliquée.
«Les grandes vedettes [Lewis Hamilton et Sebastian Vettel] ont tous été des pilotes recrues. Ils ont tous passé par un long apprentissage. Nous avons confiance en lui, mais de grâce, soyez patients.»
Williams reconnaît que Stroll a connu une entrée en matière difficile.
«Il a toutefois été contraint à l’abandon à quatre reprises au cours des six premières courses de sa carrière, a-t-elle répondu. Le comparer à Verstappen est aussi injuste. C’est un cas unique.
«Tous les jeunes pilotes, a-t-elle répété, ont besoin d’au moins un an pour se familiariser avec la voiture et les circuits. C’est un long processus. L’expérience est un gage de réussite.»
PRESSION SUPPLÉMENTAIRE
Stroll va courir devant son public pour la première fois en F1, pour la première fois aussi au circuit Gilles-villeneuve.
«C’est un week-end qu’il attend depuis longtemps, a expliqué Claire Williams, mais il devra supporter une pression supplémentaire pour bien performer devant les siens.
«Le tracé à Montréal n’est toutefois pas de tout repos, mais ce serait bien qu’il inscrive ses premiers points au championnat. Il le mérite au plus haut point.»
L’écurie Williams avait aussi accordé une première chance en F1 à Jenson Button en 2000, comme à Nico Rosberg (2006), Nico Hulkenberg (2010) et Valtteri Bottas (2013).
Claire Williams donnera naissance à son premier enfant, un garçon, en octobre. «Il est possible, de dire celle qui célébrera ses 41 ans le 21 juillet, que cet événement heureux me force à rater le Grand Prix des États-unis à Austin.»