Le Journal de Quebec

Être payé pour étudier ?

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Décidément, on n’arrête pas le progrès.

En 2012, les étudiants manifestai­ent pour pouvoir étudier gratuiteme­nt.

Cinq ans plus tard, on parle de les payer pour qu’ils étudient!

Un beau chèque de 1000 $ si tu termines ta 5e secondaire. On est vraiment rendu là? Après le carré rouge, le carré brun, comme un billet de 100 $?

ÉTUDIER, C’EST PAYANT

J’ai toujours pensé que le but de l’éducation était de nous enrichir intellectu­ellement. De nous montrer que ce qu’on a dans la tête est plus important que ce qu’on a dans les poches. Qu’il n’y a pas que le fric dans la vie. Eh bien, non. Il faut maintenant accrocher un chèque au diplôme secondaire pour le rendre plus attrayant.

L’idée proposée par Mitch Garber me paraît d’autant plus saugrenue qu’il existe déjà un incitatif financier pour rester sur les bancs d’école.

L’économiste Pierre Fortin en a fait la démonstrat­ion l’an dernier: acquérir un diplôme du secondaire ajoute de 450 000 à 560 000 dollars au revenu du diplômé sur l’ensemble de sa vie active.

Un demi-million de plus dans tes poches. N’est-ce pas suffisant en soi? Il faut ajouter un chèque de 1000 $?

Le discours économique est en train de tout bouffer.

LE TOUT ÉCONOMIQUE

Je comprends que l’argent est important, mais tout résumer à une question de dollars me déprime sans bon sens.

Le discours économique est en train de tout bouffer.

On ne parle plus de culture, mais d’industrie culturelle et on juge de la qualité d’un film en calculant le nombre de billets vendus au guichet – ce qui voudrait dire que Cruising Bar est meilleur que Pour la suite du monde.

On mélange les deux définition­s du mot «valeur»: «Ce qui est posé comme vrai, beau, bien» et «Ce que vaut un objet susceptibl­e d’être vendu».

On confond «valeur qualitativ­e» et «valeur marchande».

Jusqu’aux musées, qui doivent monter des exposition­s blockbuste­rs pour joindre les deux bouts et justifier leur existence.

Payer un jeune pour qu’il étudie est aussi tristounet que payer un jeune pour qu’il fasse de l’exercice, qu’il participe aux tâches de la maisonnée ou qu’il visite ses grands-parents.

Tu dois étudier parce que c’est bon pour toi, point.

LA VRAIE PAUVRETÉ

Je me souviens d’un étudiant qui m’avait demandé: «À quoi ça sert, la philosophi­e?»

Ma réponse: à rien. Strictemen­t rien.

Ça va juste rendre ta vie plus riche, c’est tout.

Pas riche matérielle­ment. Mais riche spirituell­ement.

Quand on est cultivé, on ne s’ennuie jamais. Tu as toujours quelque chose à faire, quelque chose à lire, quelque chose à voir. Et ça, ça vaut tout l’or du monde.

La pire pauvreté n’est pas la pauvreté matérielle. C’est la pauvreté intellectu­elle.

La pauvreté des retraités qui passent leurs journées à regarder par la fenêtre, alors qu’ils pourraient voir des expos, assister à des concerts, écouter des conférence­s ou profiter des activités gratuites offertes dans le réseau des maisons de la culture.

Comme le disait l’écrivain Louis L’amour: «La meilleure chose est d’apprendre. L’argent peut être perdu ou volé, la santé et la force faire défaut, mais ce que vous avez appris est vôtre à jamais.»

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richard Martineau richard.martineau@quebecorme­dia.com

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