« Sycophants », nom masculin et féminin, pluriel
WASHINGTON | Sycophante est un beau mot français qui prend ses racines dans le grec et le latin. On ne l’emploie pas trop, c’est clair, mais on devrait le ressortir en ces temps de trolls et de parasites informatiques.
Un sycophante est un calomniateur, un délateur, un dénonciateur professionnel. Les Anglais, comme pour bien d’autres mots, nous l’ont emprunté, l’ont redéfini et aujourd’hui s’en servent d’une tout autre façon.
Un «sycophant» (à l’anglaise) est, comme le traduit pudiquement Google, un flagorneur. En plus de ne pas signifier grand-chose aux Québécois, la définition est encore trop molle. On peut toujours lui préférer flatteur, cajoleur ou adulateur, mais la traduction qui a du sens chez nous est lèchecul. Ce n’est pas très gracieux, mais ça dit ce que ça dit.
UN CABINET QUI EN EST PLEIN
C’en était embarrassant d’entendre lundi matin à la Maison-blanche les ministres du président Trump entonner ses louanges. La rencontre devait en être une de travail, la toute première réunissant le cabinet au complet.
Donald Trump, jamais à court de superlatifs pour décrire sa présidence, a ouvert la réunion, en affirmant avoir «beaucoup de grandes nouvelles pour les Américains, alors que nous continuons de remplir nos promesses». Puis, sous le prétexte de permettre à chacun de ses ministres de se présenter, leur a donné la parole.
Tous ces hommes et les quatre femmes autour de la grande table ovale – des adultes sérieux, en principe, qui ont réussi dans la vie, la plupart millionnaires, et certains même milliardaires – se sont mis à faire l’éloge de Donald Trump d’une façon qui aurait fait rougir Kim Jong-un en Corée du Nord.
« UN HONNEUR DE VOUS SERVIR »
De Mike Pompeo – «C’est un honneur de servir comme directeur de la CIA» – au secrétaire à l’agriculture – «Je veux vous féliciter pour les hommes et les femmes que vous avez réunis ici» – les uns après les autres ont rivalisé de flatterie.
Il fallait entendre Steve Mnuchin, le secrétaire au Trésor, qui a pourtant fait fortune sur Wall Street et à Hollywood («C’était un honneur de voyager avec vous et un plus grand honneur encore que de servir dans votre cabinet») ou encore, Alex Acosta, avocat, universitaire, banquier et, depuis peu, secrétaire au Travail («Je suis privilégié d’être ici. Profondément honoré, je tiens à vous remercier»).
LES DEUX PIRES
La palme de la servilité va toutefois à deux hommes qui, effectivement, doivent beaucoup à Donald Trump. Reince Priebus, ancien président du Parti républicain, a passé par toutes les émotions pendant les primaires et a dû se faire une raison, à la toute fin, avec la victoire de Donald Trump sur d’autres candidats beaucoup plus présentables.
Priebus s’est révélé un si bon soldat pendant la course à la Maison-blanche que Trump en a fait son chef de cabinet. Et le politicien du Wisconsin s’est vautré dans la cajolerie pour lui rendre hommage lundi: «Nous vous remercions de l’opportunité et de la bénédiction que vous nous avez accordées pour servir votre agenda.» La bénédiction du Saint-père Donald!
Le champion toute catégorie reste le vice-président, Mike Pence: «C’est tout simplement le plus grand privilège de ma vie que de servir comme vice-président d’un président qui garde sa parole à l’égard du peuple américain.» L’ancien gouverneur de l’indiana serait tombé dans l’oubli, c’est vrai, si Trump n’en avait pas fait son colistier. Ce qu’on ne fait pas pour le titre de lèche-culen-chef.
C’en était embarrassant d’entendre lundi matin à la Maison-blanche les ministres du président Trump entonner ses louanges