Le Journal de Quebec

La DPJ blâmée sévèrement

Le cas d’un bambin maltraité est passé à travers les mailles du filet

- STÉPHANE BOUCHARD

CHICOUTIMI | Une plainte à la DPJ n’ayant pas été prise au sérieux et une série de mauvaises décisions ont mené à la mort d’un enfant de 20 mois en juin 2016.

L’histoire tragique de cet enfant, décédé alors qu’il n’avait pas encore deux ans, débute dès sa naissance.

« Il a eu accès à une série de spécialist­es qui auraient dû être inquiets par rapport à cet enfant-là », raconte Camil Picard, vice-président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Alors qu’il a six jours, on inscrit le bébé à un programme s’adressant aux enfants vulnérable­s. Après quelques mois, le programme prend fin en raison du manque de collaborat­ion des parents.

« Dès lors, il y aurait dû y avoir un signal qui aurait alerté les intervenan­ts », précise M. Picard. En février 2016, la famille se présente à l’hôpital pour soigner une lacération grave à l’oreille du bébé, mais elle repart avant que l’enfant reçoive des soins médicaux « parce qu’ils trouvaient que le délai était trop long. »

Un mois plus tard, la famille se rend dans un autre hôpital parce que l’enfant refuse de marcher.

On apprendra ensuite qu’il a le fémur fracturé. Personne à ce moment ne pense à alerter la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ).

SIGNALEMEN­T

La DPJ reçoit une plainte concernant ce bébé le 17 mai 2016. À partir de ce moment, « l’enfant a été mis sur une liste d’attente jusqu’à sa mort », déclare Camil Picard.

Après ce signalemen­t, une vérificati­on terrain doit survenir chez l’enfant. La DPJ fixe plutôt un rendez-vous à la famille dans ses bureaux, mais seule la mère se présente.

Il s’est passé plus de trois semaines, 23 jours exactement, entre le signalemen­t à la DPJ et le décès du bébé, médecins et spécialist­es se renvoyant la balle malgré plusieurs éléments à son dossier qui aurait dû alerter à la fois le personnel du système de santé et la protection de la jeunesse.

À la demande de la ministre déléguée à la Protection de la jeunesse, Lucie Charlebois, une enquête a été déclenchée l’an dernier.

Cette enquête, dont les résultats ont été rendus publics hier, visait, entre autres, le traitement de la plainte, les délais d’attente et l’absence d’interventi­on et de service entre le signalemen­t et le décès de l’enfant.

9 JOURS

« Il y a eu des lacunes à tous les niveaux », soutient Camil Picard, dénonçant le temps qui a passé alors que le bébé demeurait dans sa famille. « Le signalemen­t a été reçu le 17 mai et seulement le 26 mai, le signalemen­t a été retenu en négligence éducative, même pas en interventi­on d’abus possible », poursuit le vice-président de la Commission.

Le premier signalemen­t, en mai, a fait état de « blessures inquiétant­es depuis la naissance de l’enfant, l’inaction des parents face à ces blessures et la véracité questionna­ble de leurs versions en lien avec ces accidents selon les médecins », mentionne le communiqué de la DPJ. L’enfant est mort en juin 2016. En conférence de presse, la présidente-directrice générale du CIUSSS, Martine Couture, a reconnu que « le système [n’avait] pas réussi à protéger cet enfant ».

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PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE ROGER GAGNON La DPJ est sévèrement blâmée par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour la mort d’un enfant de 20 mois en 2016.

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