Incapables de dormir depuis deux mois
Des sinistrés ignorent le sort qu’attend leur maison
Des sinistrés de l’île Mercier à Montréal se sentent pris en otage par le gouvernement, qui menace de vouloir démolir leur maison si le coût des dommages des inondations du printemps est estimé à plus de 50 % de sa valeur.
« C’est comme si j’allais à l’hôpital avec un cancer et que si j’avais plus de 50 % des chances de mourir, on ne me soigne pas, encore pire, on me tue », s’indigne Denis Cauchon, qui vit dans un petit bungalow au bord de l’eau depuis plus de 30 ans.
En mai dernier, il a été forcé de quitter sa maison quand son sous-sol s’est complètement rempli d’eau. Son épouse et lui, qui servent aussi de famille d’accueil pour trois enfants, ont dû louer une résidence pour continuer d’avoir un toit.
« Je ne peux même pas réparer et payer de ma poche, parce que je ne sais pas si le gouvernement va me la faire démolir », dit-il exaspéré par les longues attentes au téléphone avec des fonctionnaires pour tenter d’en savoir plus.
Récemment, il a tout démoli dans son soussol inondé et envoie les factures au gouvernement dans l’attente d’un remboursement.
NÉANT
L’homme de 61 ans a gagné sa vie comme mécanicien. Sa maison représentait pour lui son fonds de pension, qu’il craint désormais de perdre. « Ils vont donner l’évaluation municipale, mais c’est toujours moins, où est-ce que je vais retrouver une maison avec cinq chambres à coucher au bord de l’eau », demande-t-il.
Sa voisine, Sylvie Blackburn, est dans la même galère. Sa petite demeure d’un seul plancher a été ravagée par la crue des eaux.
La quinquagénaire a dû tout arracher, les planchers et les murs. Ses électroménagers sont encore sous une tente à l’extérieur. Ils devaient sécher quelques jours, mais ils sont toujours là.
Heureusement, elle se dit l’une des seules de son île à avoir reçu 20 000 $ du gouvernement pour une démolition d’urgence. Elle attend maintenant de savoir si elle pourra reconstruire ou si elle devra tout démolir.
« On est dans le néant. Je n’ai plus de repères, plus de chez moi, je suis en arrêt de travail et je ne dors plus, car je ne pense qu’à ça », dit-elle. Mme Blackburn vit chez son conjoint sur la Rive-sud et ne vient dans sa maison que pour chercher le courrier, où des dépliants de contractants s’empilent.
COITEUX OUVERT
Le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a affirmé hier que les rapports d’inspection de toutes les résidences affectées par les inondations printanières devraient être terminés d’ici cinq semaines.
Impossible cependant de savoir si les sinistrés pourront commencer les travaux dès qu’ils recevront leur rapport d’inspection, qui doit décrire les travaux à faire et l’aide fournie par Québec, ou s’il y aura d’autres étapes à franchir.
Le ministre a dit qu’il prendrait note du fait que plusieurs personnes contestaient le décret qui empêche la reconstruction des maisons en zone inondable 0-20 ans endommagées à plus de 50 %. Il s’est dit ouvert à l’améliorer ou à le modifier. - Avec la collaboration de
Marie-ève Dumont