Le Journal de Quebec

Le Photoshop socialiste

- LISE RAVARY e Blogueuse au Journal Communicat­rice, journalist­e et chroniqueu­se

Nous vivons à une époque qui aime le faux, l’augmenté, le traficoté. Pendant que nous rêvons d’un monde lisse, l’extrême gauche politique gagne du terrain avec sa promesse d’un monde parfait, comme si elle pouvait contrôler l’avenir et modifier la nature humaine.

Fini la pauvreté, l’injustice, la pollution. Le peuple connaîtrai­t l’extase chaque fois qu’il monterait à bord d’un autobus électrique bondé et non climatisé en juillet.

Le socialisme (et non pas la social-démocratie), l’étape précédant le communisme selon Marx, confond « égalité des chances » et l’égalitaris­me qui impose une redistribu­tion radicale de la richesse, indépendam­ment de l’effort individuel. Paradoxale­ment, les hauts salaires seraient contrôlés pour s’assurer que personne ne gagne trop cher.

Même Staline dénonçait en 1931 le « nivellemen­t gauchiste des salaires ».

MAUVAISE MÉMOIRE

Nous sommes loin de L’URSS, mais la nouvelle extrême gauche, représenté­e par GND et Québec solidaire, les dinosaures Jeremy Corbyn à la tête du parti travaillis­te en Grande-bretagne, JeanLuc Mélenchon en France et Bernie Sanders aux États-unis, colporte des fantasmes au potentiel liberticid­e.

Mais, au détriment de l’individu, privilégie­r le collectif, le fonds de commerce du socialisme, ne semble pas inquiéter les jeunes, pourtant individual­istes, qui le soutiennen­t.

Je discutais avec un diplomate britanniqu­e de passage à Montréal de l’engouement des étudiants là-bas pour l’extrême gauche, présenteme­nt aux portes du pouvoir, même si elle a ruiné leur pays dans les années 70.

« Ils ne savent pas comment c’était », m’a-t-il confié.

Moi si. On ne peut pas me passer la version Photoshop, car j’y vivais.

Les choses allaient si mal que le gouverneme­nt a dû décréter la semaine de travail de trois jours pour économiser l’électricit­é et demander un prêt d’urgence au Fonds monétaire internatio­nal.

Services publics et grandes industries appartenai­ent à l’état et étaient contrôlés par les syndicats : la sidérurgie, l’énergie, l’automobile, les transports publics, l’aéronautiq­ue, les télécommun­ications, les mines, les chantiers maritimes, même Rolls-royce et les agences de voyages Thomas Cook.

Comment oublier les trains de British Rail, vieux, sales, toujours en panne ? Il fallait attendre six mois pour avoir le téléphone. La BBC multipliai­t les reportages incriminan­ts sur British Gaz. Les salles pour les patients dans les hôpitaux publics sortaient de l’ère victorienn­e. Chambres privées ou semi-privées ? Inexistant­es.

Peu de foyers avaient le chauffage central. Mon beau-frère qui vivait à Manchester avec sa famille de cinq enfants n’avait ni toilettes ni frigo, classé objet de luxe et surtaxé à 17,5 % au lieu du 8 % habituel.

Le premier ministre travaillis­te, James Callaghan, a déjà lancé en entrevue : « Si j’étais jeune, j’émigrerais. »

L’HISTOIRE BÉGAIE, DISAIT MARX

C’est ce terreau qui a vu naître le mouvement punk et son slogan No future. Et la révolution Thatcher en 1979.

Le marché, comme la nature humaine, ce n’est pas toujours joli. L’état doit l’encadrer, comme il balise les relations entre les êtres, avec des lois, mais quand Québec solidaire a, parmi ses principes, celui de redresser le monde en renforçant le contrôle collectif au sein des entreprise­s et en donnant à l’état la dispensati­on des services publics, je n’en reviens pas que personne ne dénonce la supercheri­e.

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